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Histoire & Sciences socialeset Moyen-Age  

Le Grand Ferré - Premier héros paysan
de Colette Beaune
Perrin 2013 /  23 €- 150.65  ffr. / 386 pages
ISBN : 978-2-262-02891-6
FORMAT : 14,1 cm × 21,2 cm

Cet étonnant Picard...

Universitaire et médiéviste mondialement reconnue, traduite aux États-Unis, au Brésil et au Japon, Colette Beaune est l'auteure de nombreux ouvrages de référence. Pour l'ensemble de son œuvre, elle a reçu en 2012 le Grand Prix d'histoire de l'Académie française (Grand Prix Gobert). Elle a récemment écrit et publié Le Grand Ferré. Premier héros paysan (Perrin).

Après son ouvrage sur Jeanne d’Arc, l’historienne Colette Beaune continue de revisiter le «roman national» français, puisqu’elle vient de livrer un fort bel ouvrage sur le Grand Ferré. La postérité n’est parfois pas clémente avec les héros les plus méritants : s’il était une figure incontournable sous la IIIe République, bien connue de tous les élèves, il a progressivement sombré dans l’oubli.

Pourtant, Jules Michelet tenait le Grand Ferré pour un «paysan d'une force de membres incroyable, d'une corpulence et d'une taille énormes, plein de vigueur et d'audace, mais avec cette grandeur de corps, ayant une humble et petite opinion de lui-même». En pleine guerre de Cent Ans, durant l’été 1359, seulement armé d’une hache et de sa vaillance, cet étonnant Picard repoussa victorieusement une troupe de soldats anglais menaçant son village et l’abbaye de Saint-Corneille dans les environs de Creil.

S’il ne s’agit en aucun cas de batailles décisives, la Chronique dite de Jean de Venette retraça les lignes forces de ces affrontements. L’épisode fut occulté en raison de la tendance de l’historiographique médiévale à délaisser les faits d’armes réalisés par des héros de basse extraction. Après une éclipse de quelques siècles, le Grand Ferré reparut au XVIIIe siècle sous la plume de Velly et Villaret, puis de Claude Varlier, avant que Jules Michelet s’en empare.

Ce qui fit tache d’huile, puisque les manuels abordant le cas du Grand Ferré se multiplièrent. Les jugements portés à son encontre aussi. Alors que d’aucuns considéraient qu’il s’était sacrifié pour la patrie, pour d’autres il incarna la naissance du sentiment national que Jeanne d’Arc allait matérialiser. Représentant le refus de l’envahisseur après la défaite face à l’Allemagne bismarckienne, son utilisation prépara les jeunes Français à la nécessaire revanche. Mais son souvenir s’effaça après la Seconde Guerre mondiale. On dit toutefois que Goscinny s’en inspira pour la bande dessinée Astérix et Obélix.

Jean-Paul Fourmont
( Mis en ligne le 18/06/2013 )
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