L'actualité du livre
Histoire & Sciences socialeset Moyen-Age  

Les Femmes cathares
de Anne Brenon
Perrin - Tempus 2005 /  9.50 €- 62.23  ffr. / 412 pages
ISBN : 2-262-02269-0
FORMAT : 11x18 cm

L'auteur du compte rendu : Historienne et journaliste, Jacqueline Martin-Bagnaudez est particulièrement sensibilisée aux questions d’histoire des religions et d’histoire des mentalités. Elle a publié (chez Desclée de Brouwer) des ouvrages d’initiation portant notamment sur le Moyen Age et sur l’histoire de l’art.

Une fenêtre sur une autre Église

Il n’a pas pris une ride, dans sa nouvelle édition en collection «poches», le maître-livre d’Anne Brenon. L’auteur, à la fois historienne rigoureuse et vulgarisatrice de talent, a su, à travers la publication de nombreuses études et l’animation de son centre de recherches, rendre vivant, dans sa véracité scientifique, le grand souffle religieux qui anima la France du sud-est à la fin du XIIe et au début du XIIIe siècle. Dans l’univers qu’elle fait revivre, les mots «Église», «chrétiens», ne renvoient pas à l’Église de Rome, mais à une autre croyance, une autre hiérarchie, qui eurent des adeptes, tièdes parfois, mais pour lesquelles d’autres surent mourir aussi héroïquement que naturellement. Il est vrai que le christianisme cathare apportait des réponses évidentes à des questions fondamentales, celles de l’existence en ce monde du mal, alors que Dieu est bon.

Mais ce n’est pas de théologie qu’Anne Brenon entend nous parler ici. Si l’auteur a choisi de faire revivre des femmes cathares, c’est à titre de témoins, bien documentées par des sources fiables, et non parce que les femmes auraient joué un rôle spécifique dans le catharisme. Leur importance qualitative, comme quantitative, est impossible à évaluer avoue l’auteur. Leur histoire n’est présentée ici que comme «une simple fenêtre», ouverte sur tout un monde que dénaturent encore trop (en dépit des récentes publications de toute une équipe de chercheurs français) idéalisations romanesques et préjugés.

La caractéristique majeure de cet ouvrage est sans doute à chercher dans le talent de conteur de son auteur. Anne Brenon n’a pas son pareil pour dresser un paysage, suggérer une personnalité, raconter une histoire. La mise en valeur d’Arnaude de Lamothe n’est rien d’autre que le récit du catharisme ordinaire, avec ses vocations parfois forcées, ses renoncements, ses périls. Il ne s’agit pas d’un symbole ; simplement, le hasard des sources veut que cette femme-là soit particulièrement bien documentée. Car il n’y a rien, dans ce livre, qui ne soit tiré de sources scientifiques : tout le texte nous parle d’êtres de chair et de sang, identifiés par leur vrai nom et qui ont vraiment vécu tel ou tel destin. Mais rien non plus qui ait la sécheresse de l’exposé didactique, tel qu’on aurait pu le tirer des questionnaires d’inquisiteurs, la principale source utilisée.

D’ailleurs alternent dans le livre, à côté de la démonstration par les récits, des analyses historiques, des réflexions ouvertes. Rendre vivants les personnages et recréer les cadres de vie est d’autant plus méritoire que toute trace monumentale de cette histoire a disparu. Les actuels visiteurs de Montségur y pensent-ils vraiment ?

Jacqueline Martin-Bagnaudez
( Mis en ligne le 27/04/2005 )
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