L'actualité du livre
Histoire & Sciences socialeset Période Contemporaine  

L‘Ecole et la Patrie - Histoire d’un désenchantement, 1914-1940
de Olivier Loubès
Belin - Histoire de l'éducation 2001 /  18,30 €- 119.87  ffr. / 221 pages
ISBN : 2701130069

L‘école de la patrie ?

À dépasser l’irritation causée par un vocabulaire volontiers jargonneux et la complaisance certaine de l’auteur à user d’une syntaxe alambiquée, l’ouvrage d’Olivier Loubès se lit avec un intérêt certain. La méthode de travail, qui exploite la richesse de la littérature existante mais sollicite aussi, en les mentionnant avec habileté, des ressources souvent inédites, est sérieuse en même temps qu’elle sait convaincre. De la sorte - et c’était bien là le désir de l’historien - un va-et-vient prometteur et justifié est opéré entre le discours distillé dans les lignes des manuels (faut-il rappeler l’influence culturelle considérable des « petits Lavisse » ?), les confessions des professeurs et le résultat à découvrir, souvent avec émotion, dans les cahiers d’élèves.

Le regard se porte sur les liens, tendus ou distendus, qui unissent école - qu’elle soit laïque ou confessionnelle - et patrie, enseignement et sentiment national pendant ce qu’il est commun d’appeler l’entre-deux-guerres. Il faut remercier Olivier Loubès d’apporter une analyse personnelle sur ce que spontanément l’on croit connaître. Cette ouverture est permise par le recours immodéré à la citation qui, loin de s’apparenter à un procédé facile, enfonce un peu plus le clou au fil des pages puisqu’une glose, voire une exégèse des textes, est fournie, étayant une démonstration qui serait peut-être sans cela perçue comme redondante. Le choix est fait, par celui qui s’attache à l’étude de l’imaginaire politique de la société française, d’offrir deux parties autonomes, l’une chronologique, l’autre davantage thématique. La première se propose d’analyser la place du patriotisme à l’école. La période est scandée de trois moments qui rappellent d’abord la brutalité du Premier conflit mondial et son patriobellicisme fondé sur la « haine de l’envahisseur », ensuite, dans les années 1920, après un deuil nécessaire, le rejet du sentiment guerrier et l’éclosion d’un autre qui veut célébrer la paix, croire aux succès de la SDN ainsi qu’en des valeurs pacifiques et terriennes, enfin, la défaite d’espérances de paix née dans la décennie 1930 face à une guerre devenue inéluctable.

Un second chapitre, volontairement situé sur des brisées différentes, étudie la question de « l’école unique » et la place du syndicat national des instituteurs et sa fonction sociale. Olivier Loubès réussit un livre difficile car il parvient à montrer comment « l’école est institutrice de la nation de la salle de classe aux tribunes de l’Assemblée, sans la limiter au seul rôle de son enseignement, [mais] en la replaçant dans la culture politique de son temps ».

Agnès Callu
( Mis en ligne le 27/04/2002 )
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