L'actualité du livre
Histoire & Sciences socialeset Période Contemporaine  

Naissance de l'Italie contemporaine - 1770-1922
de Gilles Pécout
Armand Colin - U - Histoire 2004 /  32 €- 209.6  ffr. / 407 pages
ISBN : 2200267924
FORMAT : 16x24 cm

L'auteur du compte rendu : Raphaël Muller, ancien élève de l'Ecole Normale Supérieure, est allocataire-moniteur en histoire contemporaine à l'université de Paris I.

Un très long Risorgimento

La publication, dans la collection universitaire U des éditions Armand Colin, d’un nouveau volume consacré à l’histoire de l’Italie du long XIXe siècle nécessite quelques explications. En réalité, il ne s’agit pas d’une véritable nouveauté puisque l’ouvrage publié n’est autre que la troisième édition française du manuel désormais classique de Gilles Pécout : Naissance de l’Italie contemporaine 1770-1922, précédemment édité chez Nathan, dans la défunte collection Fac. L’éditeur change mais non les qualités de l’ouvrage.

A première vue, on pourrait croire qu’il ne s’agit que d’un manuel universitaire, parmi tant d’autres, souvent publiés dans la même collection, sur l’histoire d’un pays étranger. Le livre de Gilles Pécout remplit certes cette fonction. Qui veut connaître précisément l’évolution politique et sociale de la péninsule italienne au cours du XIXe siècle y trouvera toutes les précisions factuelles indispensables.

Mais Naissance de l’Italie contemporaine est beaucoup plus que cela. Il n’est pas réservé aux seuls étudiants de premier cycle universitaire. L’ancienne édition a d'ailleurs rendu de grands services aux candidats au CAPES et à l’agrégation d’histoire en 2001-2002 et 2002-2003, lorsque la question d’histoire contemporaine portait sur la religion et la culture en Europe au XIXe siècle. Par sa richesse, par les problématiques introduites, par la finesse des analyses, l’ouvrage rend en outre de grands services à ceux qui entreprennent de mener des recherches sur l’Italie des XIXe et XXe siècles.

Les bornes chronologiques choisies témoignent à elles seules de la singularité du manuel. Loin de se plier à un banal découpage par siècle, l’auteur prend le parti d’interroger longuement la pertinence de telle ou telle date avant de déterminer le cadre de son étude. Le terminus ad quo - 1922 - ne nécessite pas d’explication particulière, la marche sur Rome marquant - symboliquement du moins - la fin du système politique né du Risorgimento, ce vaste mouvement de renaissance de l’Italie au XIXe siècle, qui conduisit à l’unification de la péninsule sous l’autorité de la monarchie savoyarde.

Le choix de la borne liminaire nécessite en revanche de plus amples explications. Dans le cadre d’une histoire de l’Italie au XIXe siècle, il aurait été possible de retenir en guise de terminus ad quem 1815 et les débuts de la Restauration ou 1796 et l’entrée en Italie du Nord des armées révolutionnaires menées par Bonaparte. Mais l’auteur a choisi 1770 pour intégrer à son étude l’Illuminismo, les Lumières italiennes, perçues par un vaste courant de l’historiographie italienne comme origines culturelles du Risorgimento. Si le choix de cette borne précoce souligne l’intérêt, confirmé au fil des pages, de l’auteur pour les problématiques culturelles, son attention n’est pas moins grande pour les débats historiographiques qui traversent le champ intellectuel italien. Au lieu de nous livrer de simples développements factuels, Gilles Pécout prend toujours le soin de signaler les débats importants, de rappeler les thèses en présence, de préciser les problématiques et les grands systèmes d’analyse et de compréhension de l’histoire italienne, élaborés par les historiens et les penseurs, le plus souvent italiens, mais également anglo-saxons.

En outre, on retrouve dans le volume édité par Colin les précieux et nombreux encadrés, qui, éclairages sur un point particulier ou extraits de sources, faisaient déjà la richesse des précédentes éditions. Parmi les premiers, citons de nombreuses cartes ou encore des mises au point sur la Consulte de Lyon en 1802, sur la société Dante Alighieri, ou Garibaldi. Parmi les seconds, un texte de Dumas sur Garibaldi, une lettre de Hugo au même Garibaldi et, à plusieurs reprises, le point de vue de voyageurs étrangers sur les singularités de la péninsule.

Au chapitre des nouveautés contenues dans cette nouvelle édition, un «Petit guide de l’étudiant à travers l’Italie du XIXe siècle» : une brève filmographie vient compléter la bibliographie très étoffée et elle-même enrichie. Mais surtout, l’auteur a mis au point un précieux index des ressources à la disposition du jeune chercheur souhaitant étudier l’Italie contemporaine. Les lieux d’études et de recherche ainsi que des organismes de diffusion de la production scientifique mentionnés sont situés aussi bien de ce côté-ci des Alpes qu’outre-monts, voire même outre-Atlantique dans le cas du Journal of Modern Italian Studies.

La nouvelle version mise à jour de Naissance de l’Italie contemporaine conserve donc toute les qualités des éditions précédentes. Quelques ajouts viennent l’enrichir encore. Rappelons, au moment de conclure et pour souligner encore la qualité de l’ouvrage, qu’il a été traduit en italien en 1999 chez Bruno Mondadori sous le titre Il lungo Risorgimento, et qu’il est reconnu, par les universitaires italiens eux-mêmes comme l’une des meilleurs synthèses sur l’Italie du XIXe siècle.

Raphaël Muller
( Mis en ligne le 21/12/2004 )
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