L'actualité du livre
Histoire & Sciences socialeset Période Contemporaine  

L'Allemagne de Weimar - 1919-1933
de Christian Baechler
Fayard 2007 /  27 €- 176.85  ffr. / 483 pages
ISBN : 978-2-213-63347-3
FORMAT : 16,0cm x 24,0cm

L’interlude de Weimar

La République de Weimar (1919-1933) a toujours suscité une irrésistible fascination sur les esprits, non seulement parce qu’elle figure le prélude démocratique de la période la plus barbare de l’Allemagne, mais aussi parce qu’elle a donné lieu à un foisonnement de réflexions esthétiques, philosophiques ou musicales, considérées à maints égards comme fondatrices de la «modernité».

Le regard que Christian Baechler porte quant à lui sur ces quatorze années décisives est plutôt axé sur l’évolution des structures politico-économiques qui sous-tendirent cet épisode éphémère – même si un long chapitre est bien sûr dédié à la «culture» de Weimar, marquée par l’expressionnisme, l’émergence du théâtre brechtien ou encore le courant de la Nouvelle objectivité, représenté en littérature par l’incontournable Berlin Alexanderplatz d’Alfred Döblin.

Issue de la profonde frustration de la défaite de 1918 et du sentiment de «coup de poignard dans le dos» consécutif au Traité de Versailles, aussitôt dénigrée à droite (comme régime «non-allemand») et à gauche (comme régime trop «bourgeois»), Weimar eut quelques difficultés à faire accepter ses vues. De surcroît, elle dut se tailler une voie médiane entre l’option d’une révolution bolchevique toute prête à s’installer et le nationalisme exacerbé qui, d’élément de cohésion qu’il était pendant la guerre, se mua en facteur de division et d’opposition.

Baechler détaille avec beaucoup de minutie les moindres rouages du «régime constitutionnel à l’allemande» qui se mit en place à la suite de la formation de l’Assemblée constituante en janvier 1919. Weimar s’érige alors pleinement en «démocratie sociale», basée sur une constitution et un catalogue des «droits et devoirs fondamentaux» de chaque citoyen. Après avoir été ballottée par diverses contestations internes, elle connaîtra, au lendemain de la Bataille de la Ruhr en 1923, ce que l’on appellera son «âge d’or» et verra la consolidation de ses institutions et de ses principes directeurs.

Enfin survient l’effondrement de cette parenthèse, imputable surtout à la crise de 1929 et à ses dramatiques contrecoups sociaux, auxquels le parlementarisme sera incapable d’apporter des solutions satisfaisantes. Les extrémistes – en particulier la NSDAP, organisée autour de son charismatique Führer – auront tôt fait de profiter de ce discrédit ; dès 1930, la Reichswehr (armée du Reich) interviendra directement dans les affaires politiques, en imposant l’idée de nécessité du réarmement général.

La lecture de l’ouvrage de Baechler ne s’adresse pas forcément au profane et peut parfois se révéler ardue quand elle fait la part belle aux chiffres (bilans financiers, résultats électoraux, etc.). Elle permet néanmoins de répondre à de nombreuses questions de fond qui déchirent les spécialistes du sujet depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

Frédéric Saenen
( Mis en ligne le 25/07/2007 )
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