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Histoire & Sciences socialeset Sociologie / Economie  

Les Peuples premiers - Des mémoires en danger
de Jérôme Bimbenet
Larousse 2004 /  9.59 €- 62.81  ffr. / 128 pages
ISBN : 2-03-575191-8
FORMAT : 14x19 cm

L’auteur du compte rendu : autodidacte formé à la préhistoire, notamment le Néolithique du sud-est de la France, Yvon Luneau a travaillé sur plusieurs chantiers archéologiques dans la Drôme et l’Ardèche avec Marie Hélène Moncel, de l’Institut de Paléontologie Humaine de Paris. Il poursuit actuellement une campagne de prospection de surface sur la Valdaine (26), en relation avec le Centre d’Archéologie Préhistorique de Valence, M. Beeching, archélogue (CNRS) et M. Brochier, archéo-géologue.

Une petite encyclopédie comme un cri d’alarme !

Larousse propose à ses lecteurs, dans sa collection «Petite Encyclopédie», un condensé d’informations sur différents sujets : l’objectif est de fournir des notions essentielles sur les thèmes traités. Docteur en histoire, spécialiste - il a réalisé notamment des documentaires sur les peuples traditionnels -, Jérôme Bimbenet présente ici les problèmes des peuples premiers. C’est fort de cette expérience qu’il entend nous alerter, à travers cet ouvrage, sur la place laissée aux peuples premiers dans notre société mondialisée.

L’auteur rappelle ce que sont les peuples considérés premiers, quelle est leur histoire, les menaces auxquelles ils sont confrontés, les conflits qui les secouent et leurs perspectives d’avenir. Chacune de ces cinq parties est richement illustrée et accompagnée de petits encarts qui viennent en complément d’information.

Peuples autochtones, indigènes, traditionnels, primitifs ou «natives», c’est, finalement, l’expression «peuples premiers» qui est aujourd’hui utilisé, à la suite des arts premiers chers à Picasso, Gauguin et Breton. Autant de qualificatifs, plus ou moins heureux pour qualifier une mosaïque de peuples. En effet, ce sont des chasseurs-cueilleurs, des pasteurs nomades ou des agriculteurs aux modes de vie bien différents ; ils ont pour point commun des croyances reposant sur une vision du sacré passant par le panthéisme, une cosmogonie, un rapport particulier aux ancêtres, à la naissance et à la mort.

La deuxième partie traite rapidement de leur passé. L’auteur nous rappelle les grandes migrations de la préhistoire. Certains peuples vivent encore comme à cette époque. Mais c’est la colonisation qui occupe l’essentiel de cette partie, car elle a provoqué la disparition de nombreux peuples par l’esclavagisme, les massacres, les conversions forcées, etc. C’est elle qui, paradoxalement, est une source essentielle d’informations sur le passé de ces populations.

L’auteur aborde ensuite les menaces en commençant par les peuples qui ont déjà disparu de leur fait. La colonisation et la mondialisation contribuent à la propagation de maladies jusque là inconnues dans certaines parties du monde et qui, comme la variole, font des ravages parmi ces populations. La volonté d’assimilation, la mise en réserve, associées à la paupérisation, ont favorisé l’alcoolisme et l’acculturation notamment chez les Indiens survivants d’Amérique du nord. Les appétits des différents acteurs économiques menacent leurs territoires en expulsant ou éliminant leurs habitants originels ; on découvre avec horreur que même le génome de certains peuples fait l’objet de trafics commerciaux effectués par certains laboratoires pharmaceutiques. A cela s’ajoute le sida et les problèmes écologiques liés à la surpopulation et aux changements climatiques.

En 1884-1885, à la conférence de Berlin, le chancelier allemand Bismarck présida au partage des zones d’influence en Afrique, au mépris de l’histoire locale et des rapports entretenus entre les différentes ethnies, début d’un découpage arbitraire à l’origine des pays africains actuels. Les nombreuses guerres ethniques en sont le résultat, couronnées par le génocide au Rwanda. Ces conflits menacent de nombreux peuples comme les Pygmées du Congo Kinshasa (ex-Zaïre) ou les Touaregs dont le nomadisme transfrontalier pose problème à certains gouvernements, notamment le Niger. Bien entendu, ce type d’affrontements ne se limite pas à l’Afrique ; l’auteur nous le prouve avec les exemples du Chiapas au Mexique et les Karens en Myanmar (ex-Birmanie).

Jérôme Bimbenet termine sur les perspectives d’avenir, qui laissent entrevoir une lueur d’espoir. La mondialisation favorise la circulation de l’information et permet donc la sensibilisation du public aux problèmes des peuples premiers. Des associations, des groupements favorisent la résistance culturelle, politique et économique ; ainsi, certains peuples assurent la gestion de leur territoire et de leurs richesses, c’est le cas, par exemple du Nunavut des Inuits au Canada. Tout n’est pas perdu pour les peuples premiers mais la lutte pour la survie doit se poursuivre.

Ce livre est un bon résumé des dangers qui menacent ces peuples ; chaque danger y est décrit et s’appuie sur de nombreux exemples. En fin d’ouvrage, une liste d’adresses d’organisations luttant en faveur des peuples premiers et une bibliographie, permettent au lecteur de rechercher plus d’informations, de s’investir pour leur cause. L’auteur réalise une bonne synthèse sur le sujet. Les explications sont claires, le lecteur n’est pas noyé par les informations et est sensibilisé aux dangers courus par les peuples premiers.
On peut lui reprocher d’insister sur certains fléaux qui les menacent comme l’alcool, et, surtout, le sida qui est la pandémie du siècle. Ce sont des problèmes bien connus ; d’autres, qui le sont moins, auraient mérité plus de développement.

Cet ouvrage est utile car il informe correctement le lecteur, il lui permet surtout d’expliquer et de diffuser ce message auprès de son entourage. Nous restons bien éloignés d’un Papou, d’un Nenet ou d’un Jivaro, nous avons tout à apprendre de nos différences culturelles. La diversité fait l’humanité, préservons-la, cet ouvrage nous le rappelle.

Yvon Luneau
( Mis en ligne le 24/01/2005 )
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