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Histoire & Sciences socialeset Témoignages et Sources Historiques  

De Gaulle, les services secrets et l'Algérie
de Constantin Melnik , Olivier Forcade et Sébastien Laurent
Nouveau monde 2010 /  22 €- 144.1  ffr. / 463 pages
ISBN : 978-2-84736-499-6
FORMAT : 14cm x 22,5cm

L'auteur du compte rendu : Alexis Fourmont a étudié les sciences politiques des deux côtés du Rhin.

Raison et violence d'Etat

Dans l'ouvrage De Gaulle, les services secrets et l'Algérie, Constantin Melnik revient sur son passé. Pour ce faire, il se penche sur l'action des services secrets français pendant la guerre d'Algérie et, plus précisément, à partir de l'arrivée de De Gaulle au pouvoir en 1958. C. Melnik fait plus que retracer l'histoire des services secrets, il témoigne.

En effet, l'auteur a vécu de près les évènements liés à la guerre d'Algérie, puisqu'il fut conseiller pour les affaires de renseignement auprès de Michel Debré, le premier chef de gouvernement de la Ve République naissante. Le livre comporte trois grandes parties. Il débute par une contribution de l'historien Olivier Forcade, dans laquelle l'universitaire traite l'utilisation que M. Debré a faite des services de renseignement, ceux-ci poursuivant manifestement des «fins politiques» (p.7).

Viennent ensuite les Mille jours à Matignon, Raisons d'État sous de Gaulle – Guerre d'Algérie (1959-1962), un récit que Constantin Melnik avait déjà publié en 1988. Au fil des pages, l'auteur dépeint la situation presque «romanesque» du pouvoir au plus fort de la guerre d'Algérie. Un soir de putsch, «hagard», le Premier ministre intervient à la télévision «pour essayer de lancer «à pied, à cheval et en voiture» les foules parisiennes contre des parachutistes qui ne se manifesteront jamais».

Le conseiller comprend alors que M. Debré, certes «juriste éminent, n'était pas fait pour des situations de crise ou de conflit». Pourtant, continue C. Melnik, «du retour au pouvoir du général de Gaulle en mai 1958 jusqu'au cessez-le-feu en Algérie en mars 1962, la guerre contre le FLN a été livrée et gagnée sur le terrain ; malgré barricades, putsch, manifestations de rue, attentats et tueries, l'ordre, face au FLN et à l'OAS, a toujours été maintenu ou rétabli». Ce récit entend dénouer les fils de cette «contradiction» et apporter une explication fondée sur l'action d'une «espèce de chef d'orchestre clandestin, chargé, dans l'ombre et sans que l'opinion publique le sache, de la conduite de la guerre, du maintien de l'ordre, du commandement des polices et des services spéciaux» (p.39).

L'ouvrage se clôt par un intéressant entretien de C. Melnik avec l'historien Sébastien Laurent, au cours duquel on découvre «le rôle de diplomatie parallèle» que jouait le SDECE (p.346) et les coulisses du pouvoir en pleine guerre d'Algérie. Au fil des questions, on apprend notamment que l'arrivée d'Edmond Michelet à la chancellerie amorça un retour à «la légalité» et à «l'État de droit» (p.369) et que des négociations secrètes furent menées avec le FLN (p.388). Avec le recul, l'ancien conseiller s'émeut de la «violence d'État» gaullienne (p.354), qu'il juge finalement «effrayante» (p.360).

Alexis Fourmont
( Mis en ligne le 22/12/2010 )
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