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Désordres dans le capitalisme mondial
de Michel Aglietta et Laurent Berrebi
Odile Jacob - Economie 2007 /  29.90 €- 195.85  ffr. / 445 pages
ISBN : 978-2-7381-1896-7
FORMAT : 15,5cm x 24,0cm

L'auteur du compte rendu: Guy Dreux est professeur certifié de Sciences Economiques et Sociales en région parisienne (92). Il est titulaire d'un DEA de sciences politiques sur le retour de l'URSS d'André Gide.

Les risques déflationnistes

Pour les uns, elle est une chance, pour les autres, elle est destructrice. Pour les premiers, elle déploie la taille et l'activité des marchés comme jamais en multipliant les possibilités d'échanges et de profits ; pour les seconds, elle renforce les effets de domination à l'extérieur comme à l'intérieur des économies, en concentrant sans cesse la richesse. La mondialisation a donc ses défenseurs comme ses critiques, plus ou moins radicaux. Mais ce terme de mondialisation ou, plus précisément, de globalisation, semble désigner, voire expliquer, des réalités extrêmement diverses. Que l'on décide d'investir sur les marchés monétaires et financiers depuis l'Amérique du nord, que l'on soit employé dans une entreprise de textile en Europe, que l'on soit paysan africain, ingénieur indien ou encore entrepreneur chinois, voilà à l'évidence des situations qui offrent des perspectives fort différentes d'un même vocable.

Or, si beaucoup peuvent s'accorder à reconnaître que la globalisation est une réalité multiple, peu nombreux sont les économistes qui tentent d'établir des liens entre toutes ces réalités. C'est tout l'intérêt du livre de Michel Aglietta et Laurent Berrebi qui affirment d'emblée : "Dévoiler les liens entre ces nombreux aspects est la tâche de quiconque veut comprendre le capitalisme contemporain et conjecturer son avenir." Une telle ambition ne peut reposer que sur une thèse forte, simplement exposée : "[Notre risque] consiste à affirmer et à démontrer que la crise asiatique a provoqué un changement radical dans les interdépendances qui structurent l'économie mondiale. […] Cette crise et ses séquelles ont permis aux pays émergents de se libérer de la sujétion de la dette en dollars et de recouvrer leur souveraineté sur leurs choix économiques et stratégiques."

Pour ces deux auteurs, la crise asiatique et ses suites a véritablement "changé le cours du capitalisme" puisque les pays émergents ont une influence considérable dans l'évolution du capitalisme contemporain (ne serait-ce que parce qu'ils sont devenus créanciers des Etats-Unis). Plus précisément, Michel Aglietta et Laurent Berrebi soulignent que depuis la crise asiatique, une logique déflationniste s'est mise en place. Les capacités de production croissantes au niveau mondial ne cessent de poser, à tous, la question des débouchés. Cette réalité se traduit par une concurrence de plus en plus lourde qui se fait nettement en défaveur des salariés du monde entier. Mais ces difficultés ne sont pas imputables à un seul pays ou une seule région. Après deux décennies d'une croissance mondiale soutenue et, inversement, la persistance d'une faible croissance en Europe et particulièrement dans la zone Euro, Michel Aglietta et Laurent Berrebi soulignent nettement les blocages propres à l'Union Européenne. Les politiques menées par la Commission de Bruxelles et par la Banque Centrale Européenne sont très sévèrement critiquées, notamment lorsque celles-ci se traduisent par des "taux d'intérêts réels assassins" ayant des effets récessifs évidents.

Cette grande synthèse sur l'économie mondiale, soucieuse de présenter en détail ses particularités régionales, propose donc une interprétation des principales évolutions du capitalisme d'aujourd'hui tout en mettant l'accent sur l'Europe et les éléments qui permettraient de sortir de ce qu'il faut bien appeler une "impasse".

Guy Dreux
( Mis en ligne le 16/04/2007 )
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