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Lettres de compositeurs à Camille Saint-Saëns
de Collectif
Symétrie 2009 /  49 €- 320.95  ffr. / 690 pages
ISBN : 978-2914373555

Présentées et annotées par Eurydice Jousse et Yves Gérard.

Caro Camillo

Un qui n’avait rien demandé à personne, c’est Camille Saint-Saëns. En moins d’un an, alors que ce n’était même pas son anniversaire, il a subi l’outrage d’une biographie indigne (Philippe Majorelle, Atlantica/Séguier), puis aujourd’hui l’excès d’honneur d’une correspondance de six cents lettres, publiée avec un soin luxueux par les éditions Symétrie. Encore n’est-ce qu’une infime partie des milliers de missives reçues du monde entier par le maître, aujourd’hui conservées au château-musée de Dieppe, dont un tiers des collections est issu des archives et biens personnels du compositeur.

Ces dix mille lettres ne sont elles-mêmes que la crème : «la presque totalité disparaît dans les flammes et dans l’oubli», écrit en 1906 un Saint-Saëns «effrayé par ce déluge», lequel donne une légère idée de son incroyable notoriété. Cela va de «Caro Camillo» (Bizet) à «cher Bonhomme» (Gounod), en passant par «très vaillant et honoré ami» (Liszt). La liste est éloquente : Bruch, Busoni, Chabrier, Duparc, Enesco, Glazounov, Grieg, Liszt, Paderewski, Rubinstein, Clara Schumann (quémandant conseil pour l’exécution d’un trille du Concerto en sol mineur), Tchaïkovski (qui met un point d’honneur à l’assurer en français de sa «plus chaude simpathie»), Vierne, Wagner…

À nos yeux, la plus émouvante est celle de Nadia Boulanger qui, en 1917, réclame au «cher et illustre maître» une dédicace pour sa sœur Lili, «alitée depuis des mois». La compositrice des Clairières dans le ciel mourra l’année suivante, à vingt-quatre ans. Saint-Saëns a l’élégance de leur adresser deux bons portraits autographiés.

Au milieu du volume, un épais cahier reproduit quelques cartes et objets parmi les plus singuliers de la collection : un ocarina en faïence offert à Théodore Dubois, une caricature en soldat par Gabriel Fauré, un autographe de Mozart, une boîte contenant les cheveux de Meyerbeer, le coffret néogothique en fer découpé et carton laqué dans lequel Saint-Saëns conservait les lettres de Liszt ou, mieux encore, une feuille de laurier cueillie sur la tombe de Schumann, en 1879, plus parlante qu’un traité d’histoire musicale : Saint-Saëns avait un train de retard, mais c’était le bon.

Olivier Philipponnat
( Mis en ligne le 18/01/2010 )
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