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Galerie d'art à Kékéland
de Brigitte Fontaine
Flammarion 2002 /  16 €- 104.8  ffr. / 108 pages
ISBN : 2-08-068400-0

Galerie dare-dare à Kékéland

A tout seigneur, tout honneur : c’est un autoportrait qui inaugure la « galerie d’art » que publie Brigitte Fontaine chez Flammarion. On nous la promet hilarante, cette galerie (« on », c’est l’éditeur et le site officiel de la Reine des Kékés), mais faudrait voir à pas exagérer. Non, elle est plutôt charmante, et il est vrai que l’on s’y balade agréablement. C’est un peu comme si l’on feuilletait l’album de photos des amis de Brigitte Fontaine, ou peut-être des sujets de Kékéland, en compagnie de l’intéressée. Une espèce d’ambiance à la Pascale Clark dans « En aparté » sur Canal + : les diapos défilent, l’invité commente et l’on a tout à coup l’impression de découvrir un peu son univers. Et c’est ainsi qu’au fil des pages on lève le voile sur quelques obsessions : les fringues, les genoux, les mains, le parfum des joues et la façon de rire. Un prisme à cinq facettes à travers lequel Brigitte Fontaine croque de préférence ses Kékés préférés.

Qui sont-ils, ces élus de Kékéland ? Jacques Higelin, Françoise Hardy, Serge Gainsbourg, Jeanne Moreau ou Georges Moustaki parmi les plus connus. Jurgen Kuhm, Leïla Derradji, Sylvie Bienjonetti, Jim O’Rourke ou Areski Belkacem parmi les plus intimes, auxquels le livre laisse la plus large place. Les fans y trouveront leur compte. Les autres se laisseront simplement bercer ou bousculer par l’écriture de Brigitte Fontaine – la lire c’est l’entendre – et ne bouderont pas leur plaisir devant les bravoures poétiques de la dame : « c’est à se mettre le doigt dans le cul d’admiration », « il a quand même un grand coeur, de beurre, qui ne fond pas à la chaleur » ou encore « une brute épaisse comme un casse-dalle SNCF ».

La Reine des Kékés rend à ceux qu’elle aime, à travers ce petit opus, un hommage sincère et léger. Le plus beau, le plus long aussi, étant sans doute le dernier de la galerie : « Son beau regard lourd et léger vous attrape tellement qu’on ne peut guère manger en sa présence. Lorsqu’on a échappé au charme, on se jette sur de gros sandwiches en pleurant. » C’est Jeanne (Moreau) qui met Brigitte dans cet état. Il y a d’autres Kékés qu’on aurait aimé connaître pour mieux apprécier le regard de leur portraitiste. Mais tant pis. Si Brigitte Fontaine a préféré nous parler de son petit monde à elle, c’est sans doute que « Toutes ces personnes font presque oublier qu’il existe en masse des brutes, des beaufs, des néonazis et des imbéciles. A Kékéland, tout le monde est un amour. » Et c’est sans doute pas du pipeau.

Anne Bleuzen
( Mis en ligne le 12/11/2002 )
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