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Zouc par Zouc
de Hervé Guibert et Zouc
Gallimard - L'Arbalète 2006 /  11.90 €- 77.95  ffr. / 56 pages
ISBN : 2-07-078195-X

L’auteur du compte rendu : Arnaud Genon est docteur en littérature française, diplômé de l’Université de Nottingham Trent (PhD). Professeur de Lettres Modernes, il est aussi membre du Groupe «Autofiction» ITEM (CNRS-ENS) et co-fondateur du site Hervé Guibert (http://herveguibert.net/).

Zouc l’unique

Lors d’un entretien avec François Jonquet pour le journal Globe, en février 1990, Hervé Guibert parlait en ces termes de sa relation avec la comédienne Zouc : «Une autre rencontre très importante [... en] 1973 ou 1974 : Zouc. Un coup de foudre au cours d’une interview. Dans un café on a parlé longtemps, les lumières se sont éteintes, on nous a fichus dehors, c’était l’hiver. Emmitouflée, tout en noir, comme toujours, elle a disparu, c’était étrange. [...] On s’est mis à avoir un rapport curieux ; très tendre, très physique aussi, magnifique.» De cette rencontre est né ce livre, Zouc par Zouc. L’entretien avec Hervé Guibert, qui, publié initialement en 1978, était depuis longtemps introuvable.

A la lecture de cet entretien devenu livre, sorte d’autoportrait thématique composé de 24 entrées telles que «Le souvenir», «Les enterrements» ou «L’asile», on comprend que ces deux artistes aient exercé, l’un sur l’autre, une fascination mutuelle. Zouc, comédienne suisse dont les spectacles surent marquer toute une génération, y expose en effet ses souvenirs tour à tour amusants, cocasses, émouvants voire douloureux, les souvenirs d’une enfant différente physiquement, fascinée par la mort et à l’esprit pourtant espiègle. Les souvenirs aussi de l’internement en hôpital psychiatrique qu’elle eut à affronter, alors âgée de 16 ans et demi, puis enfin ceux de son arrivée à Paris. En mélangeant les registres du comique et du tragique, le regard d’une enfant et de l’adulte lucide qu’elle est devenue, Zouc se révèle en toute franchise et simplicité. Guibert se retrouva certainement dans le récit de cette expérience de la différence, de la singularité, lui qui avait déjà entrepris son œuvre centrée sur le dévoilement de soi dut être séduit par celle qui déclarait : «Je refuse l’intimité, je déteste le privé. Pour moi, il n’y a pas les choses qu’on peut dire, et celles qu’on ne peut pas dire. Dans l’ensemble de mes rapports, je ne cache rien».

Comme Guibert le fit plus tard dans ses œuvres autofictionnelles, Zouc se dévoile. Elle nous parle et, séduits à notre tour, nous l’écoutons... Sourire aux lèvres et larme à l’œil.

Arnaud Genon
( Mis en ligne le 15/11/2006 )
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