| Alexandre Jardin Mes trois zèbres Le Livre de Poche 2015 / 7,10 € - 46.51 ffr. / 283 pages ISBN : 978-2-253-06846-4 FORMAT : 11,0 cm × 17,8 cm
Première publication en octobre 2013 (Grasset) Imprimer
Alexandre Jardin a toujours souffert de devoir accepter une existence normale, comme il nous l'explique à la première page de Mes trois zèbres. Il cherche une existence «parée de rêves» et surtout idéalement française. Mes trois zèbres nous présente trois hommes qui savaient jouer, défier, jouir qui, selon Jardin, savaient vivre. Ces sont les trois pères imaginaires de Jardin, trois hommes dont il est tombé amoureux, et qui, pour lui, incarnent sa joyeuse idée de la France.
Mes trois zèbres s'inscrit dans le sillon de Des gens très bien, où Jardin retraçait les liens unissant son grand-père, Jean Jardin (le Nain Jaune), au régime de Vichy ; mais il s'agit ici de réinventer le propos, de lensoleiller. Alexandre Jardin voulait être autre que Jardin : «Il me fallait me fabriquer un je amélioré qui soigne mon chagrin de porter un nom sali à Vichy en 1942». Donc, il sest approprié trois pères imaginaires. Ceux-ci se nomment Sacha Guitry, Charles de Gaulle et Giacomo Casanova ; trois hommes qui savaient, avant tout, se réinventer : "Ce trio denchanteurs prouve que lon peut sengendrer soi-même au lieu de se contenter dêtre né ; et quil ny a quen sinventant par écrit que lon devient Français de fibre, que lon renouvelle ce curieux pays né de livres, de songes décrivains».
Il sagit de trois vies très différentes : Sacha, dramaturge, acteur et réalisateur, qui ne restait jamais enfermé dans son propre personnage, mais qui écrivait, jouait et faisait vivre les personnages quil désirait convoquer dans sa propre réalité ; Charles, homme politique qui, en renonçant à son individualité, est devenu la création de sa propre écriture, le général de Gaulle, incarnation de la France libre ; et Giacomo, aventurier et grand séducteur, pour qui le plaisir était un principe inflexible, et qui, dans une liberté infinie, sétait recréé comme Français. Leurs points communs ? Dabord, ce sont trois créateurs deux-mêmes, ils savaient quoi faire avec le réel : «Sacha Guitry en joue, de Gaulle le défie, Casanova en jouit libéralement». Mais surtout, leurs réinventions commençaient par lécriture.
Et Jardin aussi. À la fin du récit, ses trois pères lui ont appris à vivre sans peur et pour lui-même : «Tout commence». Mais son projet ne se termine pas là. En décrivant ces trois hommes joyeusement français, il cherche à se battre contre la peur et rappeler les Français à la liberté et la joie les exhorter à VIVRE. Ce livre peut-il à lui seul réveiller la France ? Peut-être pas. Lamour décrit pour ces trois hommes paraît trop intime, trop lié à l'expérience particulière de Jardin pour quon se sente soi-même totalement embarqué.
Mais on a là un impeccable manifeste de lenzébrement...
Mari Berg Henie ( Mis en ligne le 09/02/2015 ) Imprimer
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