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De l'art de vivre au subjonctif | | | Alain Bouissière Le Bar du Subjonctif
Hatier 1999 / 12.06 € - 78.99 ffr. / 141 pages
ISBN : 2-218-72936-9
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C'est dans la bastide de Monpazier, au coeur du Périgord, qu'Alain Bouissière dit "Alain-Parfait du Subjonctif" fonda, il y a trois ans, l'association CORUPSIS (Comité pour la Réhabilitation et l'Usage du Passé Simple et de l'Imparfait du Subjonctif), destinée - en dépit de son nom - à militer contre la corruption de notre langue.
Paradoxe du destin, l'établissement qui en abrite les réunions n'est autre que l'hôtel... de Londres ! A l'heure où les anglicismes envahissent notre univers, une telle démarche semble de bon augure et illustre bien l'esprit dans lequel notre grand gourou officie. Car quiconque défend les intérêts d'un temps relégué au rang de coquetterie littéraire, ne peut le faire qu'avec recul et humour. Et de même que le personnage d'Ubu naquit du canular d'un Jarry lycéen, le projet d'Alain Bouissière est issu d'une heureuse boutade, ce qui lui donne toute sa fraîcheur et sa force.
Poussant un peu plus loin dans la douce provocation celui-ci publie aujourd'hui chez Hatier Le Bar du Subjonctif, un hymne inconditionnel à ce mode désuet dont le charme résulte justement de son incongruité. Préfacé par Jean Dutourd (adhérent 310) ce petit ouvrage, vivant et original, rassemble pêle-mêle des anecdotes, des extraits d'articles parus dans la presse régionale et nationale, ainsi qu'une sélection de lettres d'adhérents, sous des bannières astucieuses : "S.O.S subjonctif", "le subjonctif de 7 à 97 ans" "les subjugués du subjonctif", ou encore le "Tour du monde en subjonctif".
Extrêmement abondantes, les missives qui jalonnent l'ouvrage sont édifiantes : le subjonctif n'est pas mort, loin de là ! S'il suscite souvent chez ses adeptes un retour vers des thèmes et des formes anciennes, il donne surtout envie de prendre la plume, ce qui est essentiel. Contre toute attente, on pourrait ainsi imaginer un renouveau de la langue française grâce à un nouvel usage du subjonctif. Car écrivains en herbe et écrivains confirmés s'en donnent à coeur joie pour vanter ses mérites. Ils rivalisent d'inventivité et s'essaient à toutes sortes de jeux de mots et de langue plus ou moins justifiés, mais qui tous contribuent à la saveur du recueil.
Sans aucun doute, c'est à haute voix qu'il faut lire Le Bar du Subjonctif. Car on éprouve une certaine jubilation à laisser ces voyelles inattendues courir sur notre palais. Comme on dégusterait un bon vin on se régale de la musicalité des désinences et de leur veine poétique.
Il existe ainsi peut-être un art de vivre au subjonctif ouvert à toutes les générations et à toutes les nations, dans lequel un ordre deviendrait un conseil avisé, une faute une petite erreur de parcours aisément pardonnée. En définitive, apprécier le subjonctif imparfait et le passé simple, c'est sans aucun doute faire acte de tolérance et, au delà, montrer beaucoup de tendresse pour les petits travers de l'humanité. Il était donc nécessaire que le subjonctif retrouvât sa juste place dans notre existence. Et quelle meilleure jeunesse pour lui qu'une place sur Internet ? Nous nous devions de la lui offrir.
Jeanne de Ménibus
( Mis en ligne le 26/11/1999 )
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