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Retour aux sources
avec Martin Scorsese
Wild Side Video 2007 /  19.99  € - 130.93 ffr.
Durée film 125 mn.
Classification : Tous publics

Sortie Cinéma, Pays : 1963, 1964, 1974, 1978/USA
Titres originaux : What's a nice girl like you doing in a place like this ? / It's not just you, Murray ! / The big shave / Italian American / American Boy, a profile of Steven Prince

Version : : 2 DVD 9/ Zone 2
Format vidéo : 4/3, PAL
Format image : 1.33
Format audio : Anglais (Dolby digital 5.1)
Sous-titres : Français

DVD 1 : trois courts métrages
- What's a nice girl like you doing in a place like this ? (1963)
- It's not just you, Murray ! (1964)
- The big shave (1967)

DVD 2 : deux documentaires
- Italian American (1974)
- American Boy, a profile of Steven Prince (1976)

L'auteur du compte rendu : Scénariste, cinéaste, Yannick Rolandeau est l’auteur de Le cinéma de Woody Allen (Aléas) et collabore à la revue littéraire L'Atelier du roman (Flammarion-Boréal) où écrivent, entre autres, des personnalités comme Milan Kundera, Benoît Duteurtre et Arrabal.

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Martin Scorsese est un cinéaste ambigu et trouble. On lui doit des films magnifiques, Taxi Driver (1976), palme d'or à Cannes, et Racing Bull (1980). Il avait commencé sa carrière avec des films personnels et plutôt accomplis comme I Call First (1967), Boxcar Bertha (1972) et surtout Mean Streets (1973) et Alice n'est plus ici (1974). S'il est toujours un peu facile de déduire ce qui est à l'état latent dans les premières œuvres, les personnages dans les films de Scorsese ont toujours eu cette caratéristique d'être empreints d’un masochisme carabiné qui les mène souvent à l’autodestruction pure et simple. Le personnage de Travis dans Taxi driver est très représentatif de cette tendance. Cependant, il faut avouer que beaucoup de films de Scorsese sont remplis d’une complaisance visuelle, de redondances stylistiques qui les rendent à certains trop emphatiques et démonstratifs. Aviator (2004), Gangs of New York (2002), Casino (1995), Les Nerfs à vif (1991), pour prendre quelques exemples parmi tant d’autres, montrent les limites d’un cinéma qui veut traiter une thématique tout en se laissant déborder par elle : l'excès.

Martin Scorsese a tout juste 21 ans lorsqu’il réalise son premier court métrage, parallèlement aux études de cinéma qu’il mène à l’université de New York. Il n'y a pas grand chose à dire de What’s a Nice Girl Like You Doing in a Place Like This ? (1963), film de neuf minutes en noir et blanc, qui parodie les styles cinématographiques d’une façon loufoque mais assez malhabile, oubliant de traiter son sujet et privilégiant un amusement assez vain. L’histoire est celle d’un jeune écrivain qui tombe sous le charme d’une photo représentant un homme sur un bateau. Il en perdra le sommeil et l’inspiration et se retrouvera prisonnier du cliché accroché au mur de son appartement.

Tourné à peine un an plus tard, It’s Not Just You, Murray (1964) est aussi assez maladroit dans sa démarche, une sorte de brouillon de Mean Streets. Un gangster new-yorkais d'origine italienne, Murray, raconte son parcours de 1922 à 1965 et son amitié avec un autre malfrat italo-américain, Joe. Trafic d’alcool lors de la prohibition, production de spectacles de music-hall dans les années 60, prison, rien ne séparera les amis. Le film fait songer aux Affranchis, et aux deux héros inséparables incarnés par Ray Liotta et Joe Pesci. On retrouve effectivement un traitement concernant la communauté italo-américaine ainsi que l’environnement familial du cinéaste, mais sans parvenir à les mettre à distance, n’évitant pas, une fois de plus, une certaine complaisance et une fascination vis-à-vis de voyous ou de criminels.

The Big Shave(1967) est le plus impressionnant et le plus abouti (bien qu’un peu trop démonstratif) des trois courts métrages. Pendant six minutes, un homme se rase devant sa glace. La première fois, tout se passe normalement mais la seconde fois, l’homme se coupe plusieurs fois à la joue… Il finit par se trancher la gorge ! Le film joue à plein avec l’atmosphère décontractée de la bande son (une musique jazz, I Can’t Get Started de Bunny Berigan, accompagne le film), un décor clinique (une salle de bain et l'on peut penser automatiquement à Psychose) et l'insouciance que dégage le personnage. On a beaucoup parlé à son propos d’une critique virulente contre la guerre du Vietnam et l’attitude destructrice de la politique des Etats-Unis, sauf que rien ne permet de le dire cinématographiquement parlant. Reste, visuellement (c’est le principal et le plus parlant), un condensé de la thématique du masochisme évoqué plus haut. The Big Shave recevra peu après le prix de l’Age d’Or du festival surréaliste de Knock le Zout !

Le pur moment de bonheur de ce DVD est le documentaire Italianamerican (1974) réalisé par Martin Scorsese sur ses parents, Catherine et Charles. Ce film de 47 minutes, tourné en 6 heures pour 65 000 dollars, est né d'une commande officielle pour la commémoration du bicentenaire des Etats-Unis, façon pour le cinéaste de remonter aux sources et à la communauté d'où il est issu. Premiers véritables italo-américains, ses parents sont les enfants des immigrants arrivés de Sicile au début du XXe siècle. Réalisé à la bonne franquette, le film est traité sous la forme d'un dialogue entre le réalisateur et ses parents à la table de leur salon ! Et il commence par la fameuse recette de la sauce italienne pour les boulettes à la viande expliquée dans la cuisine par madame Scorsese elle-même, recette détaillée aussi dans le générique final !

A table donc, comme si vous y étiez, Charles et Catherine narrent les premiers pas de leurs parents en Amérique. Comme dans un film de fiction sans comédien, on assiste ainsi à la traversée de l'Atlantique, à l’installation des immigrants italiens dans un quartier dominé alors par les irlandais, le chômage, la surpopulation dans les appartements, la difficulté de trouver du travail et, moment comique entre tous, la façon de faire du vin en piétinant de leurs pieds le raisin ! Et dans le salon évidemment ! Parfois, le vin n’était pas tout à fait du vin mais plutôt du vinaigre qui d’ailleurs se vendait bien mieux ! Le documentaire donne ainsi au spectateur l’impression d’être comme à la veillée ; d’ailleurs, le père Scorsese rappelle que dans un monde sans télévision, les gens venaient raconter des histoires, vraies ou fausses, simplement par plaisir et par convivialité. Quelle leçon d'histoire concrète et vivante !

Le dernier documentaire, plus anecdotique, s'intitule American Boy, a profile of Steven Prince (1976) et raconte l’histoire du parcours de Steven Prince, fils du directeur de la William Morris Agency et organisateur de concerts pour Neil Diamond. En tournant là aussi à la bonne franquette, dans la maison d'Hollywood de George Memmoli, le cinéaste et quelques amis se délectent à écouter Steven Prince raconter des histoires ou des anecdotes toutes plus tordues les unes que les autres, le tout entrecoupé de films de famille. Prince parle avec entrain et bonne humeur de sa jeunesse bourgeoise, de son expérience de road-manager de Neil Diamond, de la drogue, des armes à feu et de ses relations avec son père. La séquence la plus troublante est celle où il raconte comment il a tué un caïd. Réalisé entre New York, New York et The Last Waltz, American Boy fait songer à Taxi Driver dans la façon dont le héros fait part de ses désillusions sur le rêve américain. Steven Prince y joue d'ailleurs le rôle du personnage qui vend des armes à Travis, incarné par De Niro.

Avec ces deux documentaires, on se rend mieux compte de ce qui fait souvent la force des films de Scorsese, l’art et la jubilation de conter une histoire avec force détails truculents, y compris jusque dans l'excès et l'enflure. Chacun des films et des documentaires du DVD sont présentés par Michael Henry Wilson, spécialiste du cinéma de Scorsese et auteur d’un livre d’entretiens avec lui, sorti récemment en France aux éditions des Cahiers du Cinéma.


Yannick Rolandeau
( Mis en ligne le 22/06/2007 )
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