L'actualité du livre Mercredi 1 mai 2024
  
 
     
Films  ->  

Pour vous abonner au Bulletin de Parutions.com inscrivez votre E-mail
Rechercher un réalisateur/acteur
A B C D E F G H I
J K L M N O P Q R
S T U V W X Y Z
Films  ->  Drame  
Résurrection, illusion, malédiction
avec Brian De Palma, Cliff Robertson, Geneviève Bujold, John Lithgow
Films sans frontières 2007 /  14.94  € - 97.86 ffr.
Durée film 98 mn.
Classification : Tous publics

Sortie Cinéma, Pays : 1977, Etats-Unis
Titre original : Obsession

Version : 1 DVD 9/Zone 2
Format vidéo : 16/9 compatible 4/3, PAL
Format image : 2.35 (couleurs)
Format audio : Anglais, Français (Dolby 2.0)
Sous-titres : Français

Bonus :
- Autour d’Obsession
- Biographies
- Dans la même collection

Imprimer


Sorti deux ans après Phantom of the Paradise, Obsession marque à la fois continuité et rupture avec les deux opus précédents de de Palma. En 1976, date à laquelle est tourné le film, le réalisateur compte déjà une œuvre importante mais c’est véritablement le choc Phantom of the Paradise, grand prix au festival d’Avoriaz en 1975 et véritable film culte pour toute une génération, qui lui permit de prendre la double étiquette d’auteur-réalisateur à succès. De longs plans séquences, des maniements très lents de caméra, des travellings élégants, des zooms subtils, le partage de l’écran permettant de suivre deux scènes à la fois, des scénarios à suspens construits sur un rebondissement latent ou brutal sont depuis une trentaine d’année la marque de fabrique du cinéaste.

Pour Obsession, de Palma a pris comme co-scénariste Paul Schrader (vieux complice de Scorsese). Mais une brouille concernant le dénouement du film empêchera toute nouvelle collaboration entre les deux hommes. Le film marque donc un léger tournant dans la carrière de de Palma même si l’on retrouve quelques thèmes récurrents de son œuvre. On est davantage dans le drame romantique que dans le thriller horrifique. De ce point de vue-là, Carrie au bal du Diable (grand prix à Avoriaz en 1977), réalisé peu après, réunira à la fois le fantastique de Phantom et le romantisme noir d’Obsession.

Sans trop divulguer la trame du film car chez de Palma le scénario est la clef de voûte sur laquelle il s’appuie techniquement, disons simplement que Michael Courtland (Cliff Robertson, étonnement sobre), homme d’affaire puissant, est inconsolable depuis que sa femme et sa fille sont mortes accidentellement au cours d’un kidnapping qui tourna mal. 16 ans après le drame, il aperçoit lors d’un voyage à Florence la copie conforme de sa femme (Geneviève Bujold, parfaite de délicatesse dans le registre de la femme-enfant) dans la même église où le couple s’était rencontré pour la première fois. Bouleversé et encore amoureux de sa femme (l’homme a fait construire un impressionnant mausolée sur un immense terrain vide en hommage à sa famille disparue prématurément), il séduit la jeune Sandra en qui il revoit son ancien amour, la ramène chez lui à la Nouvelle-Orléans en vu de l’épouser et de refaire sa vie avec « la même femme ». Mais l’histoire semble se répéter inlassablement sur la vie du pauvre homme jusqu’à ce qu’il comprenne qu’il est victime d’une machination depuis toutes ces années…

De Palma le crie haut et fort, son maître absolu, c’est Alfred Hitchcock, et ses films sont des hommages sinon des sortes de palimpsestes de son cinéma. Obsession s’inspire directement de Vertigo, comme Sœurs de sang s’inspirait de Psychose et de Fenêtre sur cour. On pourrait citer d’autres films qui s’appliquent à cette théorie. En cela, il affirme qu’il n’est en rien novateur dans le domaine ! Ce qui fait peut-être de lui un cinéaste finalement limité… Vaste sujet qu’on ne peut traiter ici !

La réalisation, étonnamment sobre dans ce film, oscille entre travelling lent, zoom efficace, suivant de manière évolutive la nouvelle relation qui prend forme entre Courtland et Sandra. Le spectateur suit une histoire d’amour, et de Palma la filme de manière à l’inscrire profondément dans l’imaginaire de ce dernier. Si la première partie du film se concentre sur la rencontre des deux protagonistes en évitant les clichés et en prenant le temps de s’intéresser à ses « retrouvailles » en filmant les rues de Florence avec un certain romantisme non dénué de charme, la seconde, elle, plus en phase avec ce que sait faire le réalisateur, éveille le spectateur en divulguant le piège qui se resserre sur son héros. La musique omniprésente du compositeur Bernard Herrmann, disparu peu après le tournage, accompagne pleinement les deux facettes de l’intrigue (romance et suspens) en épousant parfaitement la continuité et la logique du film. En effet, elle s’installe aussi bien durant les scènes lyriques que celles plus dramatiques, renforçant du coup la double tonalité du film. En fait, de Palma cherche à faire un film sur l’émotion amoureuse, et en cela la musique d’Hermann fait partie intégrante de la dramaturgie.

Car le réalisateur est malin, il évite d’emblée les poncifs qui peuvent caractériser le traitement d’une rencontre amoureuse en filmant le nouveau couple déambulant dans un Florence étrange, mystérieux, étonnamment vide, et la photo de Vilmos Zsigmond participe de cette impression de brume permanente conférant à l’ensemble cette fameuse étrangeté qui parsème le film de bout en bout. Même si le personnage principal semble retrouver en la personne de Sandra, sa femme disparue, l’on sait pertinemment que cet amour va tourner court, de par sa nature tout d’abord, mais aussi parce que de Palma ne compte pas faire un film sentimental ! Pas de glamour donc, mais de belles scènes montrant un homme qui ne parvient pas à faire le deuil de sa femme en conservant le souvenir d’elle en permanence (tout au moins l’image qu’elle lui a laissée, d’où le thème du double). La scène où de Palma filme le visage de Courtland apercevant le sosie de sa femme travaillant sur une peinture d’époque est évocatrice de cet impossible oubli. La « résurrection » de la jeune fille permet à cet homme de renaître enfin. L’éternel recommencement n’est pas loin… Sauf que de Palma est d’un genre cynique et pessimiste. Il fait vriller ainsi l’illusion qui pèse sur les personnages en leur soumettant la dure et triviale réalité.

Comme dans bon nombre de ses films, on retrouve ici des constantes techniques propres à son esthétique. Scène finale filmée au ralenti, ce qui peut énerver certains spectateurs, mais dont la facture permet de servir la dramaturgie et de renforcer l’impact visuel ; amitié impossible car brisée par d’ignobles intérêts d’argent (combien de soi-disant amis trahissent les personnages principaux dans l’œuvre du cinéaste : Obsession, Body Double, Outrages, L’Impasse, Snake eyes, etc. ) ; morceaux de bravoure filmés en plan-séquence, flash-back, orchestration de la violence.

Obsession n’est sans doute pas le chef-d’œuvre de de Palma ; le thème du double, par exemple, aurait pu être traité de façon plus habile mais c’est le scénario en forme de spirale et la machination qui pèse sur ses personnages pris dans un engrenage terrible qui l’inspirent avant tout. Sans parler de la mise en scène, soignée, travaillée toujours dans un souci de beauté plastique et de fluidité. Certains parlent de prouesse. Il est vrai que de Palma s’est fait un nom en inventant une esthétique qui lui appartient seul. En littérature, en parlerait de maniérisme tant de Palma soigne et prépare ses plans avec une dextérité incroyable. Avec Obsession, il insère le thème de l’éternel recommencement, problématique romantique et romanesque s’il en est… En cela, ce film est de bon augure, ancré pleinement dans le cinéma américain inquiétant des années 70.


Jean-Laurent Glémin
( Mis en ligne le 21/09/2007 )
Imprimer

A lire également sur parutions.com:
  • Phantom of the Paradise
       de William Finley
  • La Clef
       de Guillaume Nicloux
  • L’Impasse - Edition Blu-Ray
       de Brian De Palma
  •  
    SOMMAIRE  /  ARCHIVES  /  PLAN DU SITE  /  NOUS ÉCRIRE  

     
      Droits de reproduction et de diffusion réservés © Parutions 2024
    Site réalisé en 2001 par Afiny
     
    livre dvd