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Résurrection, illusion, malédiction avec Brian De Palma, Cliff Robertson, Geneviève Bujold, John Lithgow Films sans frontières 2007 / 14.94 € - 97.86 ffr. Durée film 98 mn. Classification : Tous publics | Sortie Cinéma, Pays : 1977, Etats-Unis
Titre original : Obsession
Version : 1 DVD 9/Zone 2
Format vidéo : 16/9 compatible 4/3, PAL
Format image : 2.35 (couleurs)
Format audio : Anglais, Français (Dolby 2.0)
Sous-titres : Français
Bonus :
- Autour dObsession
- Biographies
- Dans la même collection Imprimer
Sorti deux ans après Phantom of the Paradise, Obsession marque à la fois continuité et rupture avec les deux opus précédents de de Palma. En 1976, date à laquelle est tourné le film, le réalisateur compte déjà une uvre importante mais cest véritablement le choc Phantom of the Paradise, grand prix au festival dAvoriaz en 1975 et véritable film culte pour toute une génération, qui lui permit de prendre la double étiquette dauteur-réalisateur à succès. De longs plans séquences, des maniements très lents de caméra, des travellings élégants, des zooms subtils, le partage de lécran permettant de suivre deux scènes à la fois, des scénarios à suspens construits sur un rebondissement latent ou brutal sont depuis une trentaine dannée la marque de fabrique du cinéaste.
Pour Obsession, de Palma a pris comme co-scénariste Paul Schrader (vieux complice de Scorsese). Mais une brouille concernant le dénouement du film empêchera toute nouvelle collaboration entre les deux hommes. Le film marque donc un léger tournant dans la carrière de de Palma même si lon retrouve quelques thèmes récurrents de son uvre. On est davantage dans le drame romantique que dans le thriller horrifique. De ce point de vue-là, Carrie au bal du Diable (grand prix à Avoriaz en 1977), réalisé peu après, réunira à la fois le fantastique de Phantom et le romantisme noir dObsession.
Sans trop divulguer la trame du film car chez de Palma le scénario est la clef de voûte sur laquelle il sappuie techniquement, disons simplement que Michael Courtland (Cliff Robertson, étonnement sobre), homme daffaire puissant, est inconsolable depuis que sa femme et sa fille sont mortes accidentellement au cours dun kidnapping qui tourna mal. 16 ans après le drame, il aperçoit lors dun voyage à Florence la copie conforme de sa femme (Geneviève Bujold, parfaite de délicatesse dans le registre de la femme-enfant) dans la même église où le couple sétait rencontré pour la première fois. Bouleversé et encore amoureux de sa femme (lhomme a fait construire un impressionnant mausolée sur un immense terrain vide en hommage à sa famille disparue prématurément), il séduit la jeune Sandra en qui il revoit son ancien amour, la ramène chez lui à la Nouvelle-Orléans en vu de lépouser et de refaire sa vie avec « la même femme ». Mais lhistoire semble se répéter inlassablement sur la vie du pauvre homme jusquà ce quil comprenne quil est victime dune machination depuis toutes ces années
De Palma le crie haut et fort, son maître absolu, cest Alfred Hitchcock, et ses films sont des hommages sinon des sortes de palimpsestes de son cinéma. Obsession sinspire directement de Vertigo, comme Surs de sang sinspirait de Psychose et de Fenêtre sur cour. On pourrait citer dautres films qui sappliquent à cette théorie. En cela, il affirme quil nest en rien novateur dans le domaine ! Ce qui fait peut-être de lui un cinéaste finalement limité
Vaste sujet quon ne peut traiter ici !
La réalisation, étonnamment sobre dans ce film, oscille entre travelling lent, zoom efficace, suivant de manière évolutive la nouvelle relation qui prend forme entre Courtland et Sandra. Le spectateur suit une histoire damour, et de Palma la filme de manière à linscrire profondément dans limaginaire de ce dernier. Si la première partie du film se concentre sur la rencontre des deux protagonistes en évitant les clichés et en prenant le temps de sintéresser à ses « retrouvailles » en filmant les rues de Florence avec un certain romantisme non dénué de charme, la seconde, elle, plus en phase avec ce que sait faire le réalisateur, éveille le spectateur en divulguant le piège qui se resserre sur son héros. La musique omniprésente du compositeur Bernard Herrmann, disparu peu après le tournage, accompagne pleinement les deux facettes de lintrigue (romance et suspens) en épousant parfaitement la continuité et la logique du film. En effet, elle sinstalle aussi bien durant les scènes lyriques que celles plus dramatiques, renforçant du coup la double tonalité du film. En fait, de Palma cherche à faire un film sur lémotion amoureuse, et en cela la musique dHermann fait partie intégrante de la dramaturgie.
Car le réalisateur est malin, il évite demblée les poncifs qui peuvent caractériser le traitement dune rencontre amoureuse en filmant le nouveau couple déambulant dans un Florence étrange, mystérieux, étonnamment vide, et la photo de Vilmos Zsigmond participe de cette impression de brume permanente conférant à lensemble cette fameuse étrangeté qui parsème le film de bout en bout. Même si le personnage principal semble retrouver en la personne de Sandra, sa femme disparue, lon sait pertinemment que cet amour va tourner court, de par sa nature tout dabord, mais aussi parce que de Palma ne compte pas faire un film sentimental ! Pas de glamour donc, mais de belles scènes montrant un homme qui ne parvient pas à faire le deuil de sa femme en conservant le souvenir delle en permanence (tout au moins limage quelle lui a laissée, doù le thème du double). La scène où de Palma filme le visage de Courtland apercevant le sosie de sa femme travaillant sur une peinture dépoque est évocatrice de cet impossible oubli. La « résurrection » de la jeune fille permet à cet homme de renaître enfin. Léternel recommencement nest pas loin
Sauf que de Palma est dun genre cynique et pessimiste. Il fait vriller ainsi lillusion qui pèse sur les personnages en leur soumettant la dure et triviale réalité.
Comme dans bon nombre de ses films, on retrouve ici des constantes techniques propres à son esthétique. Scène finale filmée au ralenti, ce qui peut énerver certains spectateurs, mais dont la facture permet de servir la dramaturgie et de renforcer limpact visuel ; amitié impossible car brisée par dignobles intérêts dargent (combien de soi-disant amis trahissent les personnages principaux dans luvre du cinéaste : Obsession, Body Double, Outrages, LImpasse, Snake eyes, etc. ) ; morceaux de bravoure filmés en plan-séquence, flash-back, orchestration de la violence.
Obsession nest sans doute pas le chef-duvre de de Palma ; le thème du double, par exemple, aurait pu être traité de façon plus habile mais cest le scénario en forme de spirale et la machination qui pèse sur ses personnages pris dans un engrenage terrible qui linspirent avant tout. Sans parler de la mise en scène, soignée, travaillée toujours dans un souci de beauté plastique et de fluidité. Certains parlent de prouesse. Il est vrai que de Palma sest fait un nom en inventant une esthétique qui lui appartient seul. En littérature, en parlerait de maniérisme tant de Palma soigne et prépare ses plans avec une dextérité incroyable. Avec Obsession, il insère le thème de léternel recommencement, problématique romantique et romanesque sil en est
En cela, ce film est de bon augure, ancré pleinement dans le cinéma américain inquiétant des années 70.
Jean-Laurent Glémin ( Mis en ligne le 21/09/2007 ) Imprimer
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