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Au bon chic intello
avec Jim Jarmusch
BAC Vidéo 2008 / 
Classification : Tous publics

Sortie Cinéma, Pays : États-Unis, 1980-1989
Sortie DVD : Mai 2008

Version : 4 DVD 9/Zone 2
Format vidéo : PAL, formats 1.33 et 1.78
Format image : N&B, Couleurs, 16/9 compatible 4/3,
Format audio : Anglais, Mono
Sous-titres : Français
Prix : 14.99 € par DVD (vendus séparément)


Bonus :
- Rencontre avec Jim Jarmusch
- Making-of muet filmé par Tom Jarmusch
- Entretien avec le directeur de la photographie Robby Müller (VOSTF)
- Scènes coupées - Conversations téléphoniques entre Jim Jarmusch, Tom Waits, Roberto Benigni et John Lurie (audio)
- Clip vidéo de Tom Waits «It’s alright with me», réalisé par Jim Jarmusch
- Filmographies
- Galerie Photos
- Bandes-annonces
- Lien Internet

L'auteur du compte rendu : Scénariste, cinéaste, Yannick Rolandeau est l’auteur de Le Cinéma de Woody Allen (Aléas) et collabore à la revue littéraire L'Atelier du roman (Flammarion-Boréal) où écrivent, entre autres, des personnalités comme Milan Kundera, Benoît Duteurtre et Arrabal.

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Les films de Jim Jarmusch, a priori, sont plutôt agréables à regarder mais sont-ils de bons film et ne sont-ils finalement assez conformistes et «adolescents» en regard de l’air du temps ? Ils s'inscrivent tout à fait dans la période d'errance et de vacuité qui a suivi les années 60-70, avec une perte de repères renforcée par un individualisme forcené et un renfermement sur soi.

Bac Films ressort les quatre premiers longs du cinéaste, histoire de juger sur pièce. Cinéphile à cause d’une mère critique de cinéma dans un journal local de l'Ohio, Jim Jarmusch déménage pour New York à 17 ans. Il étudie la littérature à l'université de Columbia avant de partir un an à Paris où il fréquente la Cinémathèque. De retour à New York, il s'inscrit dans la section cinéma de la New York University et finance son film de fin d'études, Permanent Vacation, avec l'argent d'une bourse destinée à payer ses frais de scolarité. Jim Jarmusch est un cinéaste lié au côté indépendant du cinéma américain : fan de rock, avec un côté cool et errance post-Wim Wenders, Wenders qui co-finance d'ailleurs son premier long métrage, Stranger than Paradise (1983) et dont il fut l'assistant sur Nick's Movie. Nouvelle coqueluche du cinéma US, il réalise Down by Law puis Mystery train. En 1995, il revisite le western avec Dead Man, réalise un portrait de samouraï, le très esthétisant Ghost Dog (1999). Il signe en 2005 Broken flowers avec Bill Murray.

Permanent Vacation (1980) est le premier film du cinéaste. Film très lent qui raconte l'errance d'un personnage, Alloysious Parker (Chris Parker). Le personnage ne vit rien de tangible : il erre. Son «but» : ne pas travailler, ne pas payer d'impôts, échapper à toutes obligations. Il est dans un mythe, celui d'agir pour soi et ne se laisser influencer par personne. Il est solitaire. Tout au long du film, il rencontre diverses personnes (une folle, un joueur de saxophone, etc.) et le problème est que ces personnes désœuvrées n'ont rien de plus à dire, sinon à déclamer un texte pour la circonstance. Tout cela est terriblement maladroit car il ne suffit pas de parler de marginaux pour être intéressant. Il ne se passe pas grand chose et le film est assez ennuyeux. Il en reste une vague ambiance (un New York déserté et en quasi ruine par endroits) mais sans aucun contenu réel et palpable, riche surtout. Le film accuse son côté étudiant-sans-le-sou : voix monocorde du personnage principal, citations de livres (Les Chants de Maldoror), gestes et diction imprécise, raccords de son approximatifs, cadrages aléatoires. Permanent Vacation ne mérite pas les éloges que l'on lui a faits. Le film fait «intello» et joue beaucoup de cette pose branchée que le cinéaste va cultiver tout en donnant un ton nonchalant et dégagé.

Stranger Than Paradise (1982), en noir et blanc, est mieux réalisé et s'inscrit dans la même veine du road-movie. Willie (John Lurie) est un hongrois venu vivre à New York. Expatrié, il est déraciné et vit seul dans une petite chambre, dans laquelle il reste tout le temps, en regardant la télévision. Il ne fait rien de ses journées, sinon d'aller jouer aux courses pour gagner un peu d'argent. Il devient égoïste et intransigeant, se renferme sur lui-même. Sa vie est totalement vide de sens. Un jour, sa cousine, Eva (Ezster Balint) débarque chez lui et y vit quelques jours. Willie ne change pas pour autant son mode de vie. Mais une fois partie, Willie et son ami Eddy (Richard Edson) vont rendre visite à Eva à Cleveland.

Le film est simple, découpé en trois parties avec de fréquents noirs à l'écran. La première se passe dans la chambre de Willie avec l'arrivée d'Eva. La seconde, quand Willie et Eddy rendent visite à Eva et repartent. Et la troisième quand tous les trois vont en Floride. Si Stranger Than Paradise est sans doute le meilleur film de Jim Jarmush, il reste tout de même d'une portée limitée. Le cinéaste affectionne les marginaux. Le problème est qu'ils ne vivent pas grand chose sinon regarder la télévision et manger des TV-Diners (Plateaux TV). Le personnage central, Willie, est égoïste, sans émotion, ne faisant pas réellement attention aux autres. Les autres personnages ne valent guère mieux, y compris Eva, même s'ils ont plus de valeurs humaines. Rapidement, le film tourne en rond et parvient à donner un sentiment de vacuité assez prégnant. La qualité principale du film est sa sobriété, en n'indiquant pas spécialement si le comportement de Willie est moral ou immoral. En ce sens, le film n'est pas très complaisant envers les marginaux et les déshérités tellement ceux-ci ne vivent rien, n'ont pas de projet ou de réelle "humanité", mais il n’est pas trop critique non plus. La caméra de Jim Jarmush aime bien les mettre en scène, ce qui donne à ses films un climat lent, nonchalant mais aussi un peu vain, sans réelle épaisseur, ambigüité ou complexité.

Down by Law (1986) poursuit la même veine du road-movie (que ce soit à pied ou en voiture) mais avec moins de "naturel" ou de "spontanéité". Dans le bayou, en Louisiane, Jack (John Lurie) et Zack (Tom Waits), deux paumés, se retrouvent en prison et rencontrent Roberto (Roberto Benigni), rempli de l'entrain qui leur manque. Il les pousse à s'évader. Le film est réalisé une fois de plus en trois parties (presque une demi-heure chacune) : la première présente surtout deux personnages, Jack et Zack, jusqu'à ce que ceux-ci se retrouvent en prison. La seconde se passe en prison jusqu'à l'évasion et la troisième se concentre sur la fuite dans le Bayou.

Down by Law, en noir et blanc, est un film qui joue sur les contrastes, les rapports difficiles et conflictuels entre Jack et Zack. Le plus étrange dans toute l’intrigue est bien entendu que Roberto, malgré son étrange dégaine et son déplorable accent, réussit tout ce qu'il entreprend : c'est lui qui les aide à s'enfuir, qui déniche de quoi manger, qui trouve une femme italienne dans un restaurant... C'est d'autant plus étrange que le film ne les montre pas s'enfuir de la prison et que Roberto trouve une femme très facilement. Ce qui ne surprend guère Jack et Zack. Le procédé est aussi troublant que factice car en réalité, on ne débouche sur rien d’autre. Fait de plans séquences, étirant la narration jusqu’aux limites de l’ennui, le film est assez calme, posé, lisible et transparent dans sa facture. Comme la plupart des films de Jim Jarmusch, on a une atmosphère sympathique mais guère de profondeur, comme si le cinéaste ne parvenait pas à dépasser ses propres personnages et leurs capacités. Il les entoure d'un halo étrange, mystérieux, voire drolatique mais c’est tout, sans que l’on puisse accéder à une dimension plus complexe.

Mystery Train (1989), enfin, se passe à Memphis, la ville du King Elvis Presley. C'est un nouveau road-movie en trois parties et en couleurs : un couple de Japonais en pèlerinage (Loin de Yokohama), une jeune femme venant chercher les restes de son mari (Un fantôme), des amis dépressifs et alcooliques commettant un hold-up et blessant un homme (Perdus dans l’espace). Tout comme le précédent film, Mystery Train joue sur les plans séquences et les trois histoires successives se déroulent en fait en même temps. Si les personnages ne se connaissent pas forcément, ils ont des liens entre eux ; Dee-Dee dans Un fantôme est la sœur de Charlie (Steve Buscemi) qui joue dans Perdus dans l’espace ; ou bien, ils se croisent. Ils peuvent aussi se trouver sur le même lieu au même moment, souvent dans l'hôtel avec son groom et sa casquette et le non moins étrange réceptionniste noir à la cravate assortie à la veste couleur rouge vif. On n'apprend ceci qu'au fur et à mesure que le film avance. Par exemple, le coup de feu qu'entend le couple de touristes japonais au début se résout dans la troisième histoire. Quand ce même couple fait l'amour, leurs gémissements sont entendus dans la seconde histoire où la femme italienne, Luisa, et la sœur de Charlie, Dee Dee, partagent la même chambre. Les trois histoires sont aussi reliées par la chanson d'Elvis Presley, annoncée sur une radio par un D.J. (voix de Tom Waits), Mystery Train.

La construction est donc simple, aisée et bien structurée et le film en lui-même se laisse regarder sans déplaisir. Mais comme bien souvent chez le cinéaste, on reste sur sa faim tant le style détaché du cinéaste ne fait qu'effleurer les choses. On a donc du mal à saisir véritablement ce qui fait l’engouement d’un certain public pour les films de Jim Jarmusch, au point de les considérer comme emblématiques, novateurs ou singuliers. Néanmoins, on comprend le registre sur lequel il joue car le côté sympathique de ses films ne dérange pas trop, offre un cinéma de qualité, fait «auteur» sans être trop cérébral et donne habilement une certaine distanciation et un second degré tout en mêlant des personnages assez loufoques ou étranges. Sympathique donc, mais assez creux.


Yannick Rolandeau
( Mis en ligne le 23/05/2008 )
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