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Films  ->  Comédie dramatique  
L'art du conteur
avec Abbas Kiarostami, Babek Ahmed Poor, Ahmed Ahmed Poor
Les Films du Paradoxe 2007 / 
Classification : Tous publics

Sortie Cinéma, Pays : Iran, 1974, 1987 et 1991
Sortie DVD : 25 octobre 2007
Titre original : Mossafer / Khane-ye doust kodjast? / Zendegi va digar hich

Version : 3 DVD 9, Zone 2
Durées DVD : 74mn, 87 mn, 91 mn
Format vidéo : PAL, format 1.33
Format image : Couleurs, 4/3
Format audio : V.O. mono
Sous-titres : Français

Prix : 19,36 € par DVD


Bonus : courts métrages
- Le Pain et la rue (1970) 10 min. (in DVD Le Passager)
- La Récréation (1972) 11 min. (in DVD Où est la maison de mon ami ? )
- Le Choeur (1982), 17 min. (in DVD Et la vie continue )

L'auteur du compte rendu : Scénariste, cinéaste, Yannick Rolandeau est l’auteur de Le Cinéma de Woody Allen (Aléas) et collabore à la revue littéraire L'Atelier du roman (Flammarion-Boréal) où écrivent, entre autres, des personnalités comme Milan Kundera, Benoît Duteurtre et Arrabal.

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Abbas Kiarostami est entré dans le cinéma par la petite porte. C'est en 1997 qu'il obtint la palme d'or à Cannes pour son film Le Goût de la Cerise, ex aequo avec L'Anguille de Shoshei Immamura. Né en à Téhéran en 1940, Abbas Kiarostami a toujours été intéressé par l’art et le cinéma. Il gagne un concours de peinture à dix-huit ans et fait ses études à la faculté des Beaux-Arts de l’Université de Téhéran. Il finance une partie de ses études en travaillant en tant qu’agent de la circulation. Dans les années 1960, comme peintre, concepteur et illustrateur, il travaille dans la publicité. Il conçoit des affiches et crée des films publicitaires. Entre 1962 et 1966, il tourne environ 150 annonces pour la télévision iranienne. Vers la fin des années 1960, il crée des génériques pour des films et illustre des livres pour enfants.

Dans le sillage en 1969 de la Nouvelle Vague iranienne, Kiarostami participe avec Ebrahim Forouzesh à la création d’un département réalisation à l’Institut pour le Développement Intellectuel des Enfants et des Jeunes Adultes de Téhéran (le Kanun), dédié à l'origine à la publication de livres pour enfants. Créé sous l’impulsion des Pahlavi pour détourner la jeunesse iranienne de la politique, le Kanun est l'une des deux structures publiques de production de films en Iran.

Le Passager est d’ailleurs produit par le Kanun. Un jeune adolescent de province, Hassan Darabi, un garçon de dix ans, difficile et amoral, passionné de football, décide de monter à la capitale pour voir l’équipe nationale de football jouer un match important à Téhéran. Avec l’aide de son ami, il fait l’impossible pour réunir l’argent nécessaire… Pour y arriver, il arnaque ses amis et des voisins au point de leur faire croire qu'il les prend en photo. Après nombre d’aventures, il atteint finalement le stade Azadi à l’heure du match. Sauf que... N'en disons pas plus sous peine de trahir le ressort du film.

Abbas Kiarostami a le sens des petites histoires simples, sortes de contes ruraux. Sans jamais appuyer le trait, l'ironie finale du Passager a quelque chose d'absurde. Pour son premier long-métrage, le cinéaste fait preuve de simplicité - comme ce sera son habitude plus tard - en instaurant un rythme allant de soi tout en croquant la vie quotidienne de ses habitants. Il n'y a ici aucun moralisme mais à l'inverse un regard frôlant parfois celui du documentaire mais en s'inscrivant résolument dans la simplicité de la fiction. En bonus, nous trouvons un court-métrage, intitulé Le Pain et la rue, produit par le même Institut. Première réalisation de Kiarostami, ce film de dix minutes en noir et blanc est un court métrage néo-réaliste ayant pour sujet la confrontation d’un écolier et d’un chien agressif. Le plus amusant est bien entendu le chien qui devient ensuite très gentil... quand le petit garçon lui a donné un bout de pain. Il l'accompagne même jusque devant chez lui et recommence le même "cirque" auprès d'un autre petit garçon... Amusant.

Le second DVD propose l’un des meilleurs films d'Abbas Kiarostami, Où est la maison de mon ami ?, un film émouvant. À l’école du village de Koker, Mohamed Reda Nematzadeh (Ahmed Ahmed Poor) néglige de faire ses devoirs sur le cahier prévu à cet effet ; au prochain oubli, il sera renvoyé ! Or, ce soir-là, son camarade, Ahmed (Babek Ahmed Poor) emporte par mégarde le cahier de Nematzadeh et se lance à la recherche de la maison de son ami, dans les hameaux voisins de Pochté pour lui rendre son bien… Mais en arrivant à Pochteh, on lui dit que Mohamed, son ami, est parti pour Koker.

L'histoire en dit long déjà sur le souci d'autrui chez le petit Ahmed. Il faut dire que le petit garçon est remarquable de présence. Car il marche, court, revient sur ses pas, en fait des kilomètres et des kilomètres pour rendre le cahier à son camarade afin que celui-ci échappe à la punition. Réussira-t-il ? Un vrai suspense à sa manière ; à un moment, un vieil homme l'emmène voir les portes en bois qu'il a construites, retardant notre Ahmed dans sa "mission". Abbas Kiarostami nous dépeint les croyances traditionnelles des campagnards iraniens, nous décrit la vie simple et difficile des gens simples et le tout est réalisé avec une simplicité et une humilité confondantes. Un petit bijou de film. Bien sûr, ce qu'il y a d'émouvant dans ce conte est la façon dont le cinéaste nous décrit telle ou telle ville, telle ou telle personne, tel ou tel paysage au point que l'on a l'impression d'avoir voyagé dans ces contrées ! Mais surtout, c'est la sincère angoisse et la culpabilité du petit Ahmed pour son ami qui sont bouleversantes. On ne peut pas faire plus élégant dans l'humanisme et Abbas Kiarostami n'en fait jamais trop : la fin du film est absolument remarquable de simplicité.

Troisième DVD récemment sorti chez les Films du Paradoxe, Et la vie continue est le dernier film de Kiarostami produit par le Kanun. Après le tremblement de terre de 1990 qui a ravagé le nord de l’Iran, un cinéaste (Farhad Kheradmand) et son fils Puya (Buba Bayour) tentent de rejoindre le village de Koker situé au centre de la catastrophe. L’homme s’inquiète de savoir si les deux enfants qui avaient joué dans Où est la maison de mon ami ? sont encore en vie. Il interroge les passants en leur montrant une photo du film de Abbas Kiarostami.

On connaissait le goût du cinéaste pour le voyage, les pérégrinations tortueuses dont son cinéma est rempli. Nous voici ici jetés dans la Renault 5 cabossée d'un cinéaste et de son petit garçon. Là encore, nous voyageons à travers l'Iran, sur des routes sinueuses, caillouteuses et pleines de poussière. Une nouvelle fois, le cinéaste arrive à faire passer cela comme une lettre à la poste. Au passage, la voiture s'arrête pour prendre une personne, aider à transporter un objet trop lourd. Sans cesse, l'entraide est présente entre les gens, naturelle, allant de soi.

La grande force du film est précisément de ne jamais dramatiser son propos. Fait même plus étonnant au coeur d'un tel drame, Abbas Kiarostami se paye le luxe de mettre par moment une musique classique légère comme pour nous faire prendre une distance face à une telle tragédie, non pas, bien évidemment, pour la nier ou s'en moquer mais justement pour nous faire comprendre (le titre est là pour cela) qu'il ne servirait pas à grand chose de verser dans le mélodrame.

On reconnaît au passage quelques décors, comme la maison aux volets bleus, qui seront présents dans le film suivant d'Abbas Kiarostami, Au travers des oliviers. Avec aussi une musique classique aérienne... Avec une grande économie de moyens et une simplicité de ton, Abbas Kiarostami nous fait saisir la présence du temps et du monde.


Yannick Rolandeau
( Mis en ligne le 07/12/2007 )
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       de Abbas Kiarostami
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