| Olivier de Solminihac Nous n’avons pas d’endroit où vivre L'Olivier 2009 / 18 € - 117.9 ffr. / 228 pages ISBN : 978-2-87929-633-3 FORMAT : 14cm x 20,5cm Imprimer
Olivier de Solminihac est un jeune auteur (il est né en 1976) qui a déjà deux romans à son actif (Partir et Descendre) et plusieurs livres pour enfants. On retrouve avec Nous navons pas dendroit où vivre des thèmes des textes précédents (en particulier lAfrique), mais un texte sans doute plus dense, plus abouti.
Autofiction : lhistoire dun jeune correcteur dans lédition, Manuel, qui est invité, un peu faute de mieux, à aller animer des ateliers décriture pour enfants au centre culturel français de Namibie. Lieu improbable, expérience des lointains à tous points de vue. Que cherche-t-on en voyageant ? A se retrouver ? A soublier ? Manuel espère retrouver lécriture, il abandonnera dans le sable le cahier entamé, mais finalement le livre sera écrit, ailleurs, autrement. Entre le début et la fin de lhistoire, un lien léger, solaire : le caméléon vivant que les enfants marocains attachent par jeu cruel à un arbre, celui en ferraille que Manuel achète en souvenir le jour de son départ de la Namibie, et quau retour il pose sur son bureau du Nord.
Nous navons pas dendroit où vivre, cest aussi lhistoire dun pays à la dérive, des townships sans espoir, de rencontres ratées entre lOccident et lAfrique, de la peur entre communautés, des expatriés qui pourraient vivre nimporte où dans le monde puisquils transportent avec eux leur univers, indifférents au lieu où ils se trouvent. Lénigmatique Guillaume qui a invité Manuel, Camille artiste invitée elle aussi, Amélie, Séverine, la directrice du lycée
quelques silhouettes féminines qui travaillent au centre culturel et sefforcent à cette tâche improbable : diffuser la culture française dans un monde qui nen a cure. Windhoek, la capitale, partagée entre les ghettos riches et Katutura, le quartier des townships. Katutura au nom mystérieux, que lon peut traduire pas «Nous navons pas dhabitat permanent», «Notre demeure ici nest pas éternelle» (p.133), Katutura où lon obligea les populations pauvres à sinstaller contre leur gré, par la violence. Il fallut dix ans pour leur faire quitter leur quartier antérieur dOld Location. Katutura que lon voulut traduire par «Nous voulons y aller et y rester». Contresens volontaire (?) qui éclaire aussi tout le récit. Tout est histoire de nom. Et tout est dit page 116 : «Cest lhistoire des enfants de Katutura, et cest lhistoire de gens qui habitent loin de chez eux».
En 106 brefs chapitres, dune écriture un peu sèche, implacable souvent, Manuel dresse un constat sans espoir, ou si peu, même si les enfants, eux, échappent au désenchantement général : «Mon surnom est Ngendjedi, cest-à-dire Rêve. Quand je suis née, mon père pensait que cétait un rêve, mais cétait vrai» (p.126).
Une réflexion sur ce qui fonde lidentité, les racines, entre carnet de voyage, introspection et découverte de lautre.
Marie-Paule Caire ( Mis en ligne le 06/03/2009 ) Imprimer | | |