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Rétrospective d'un peintre chinois de France | | | Collectif Peng Wants - Peintures, Dessins, Ecrits 5 Continents 2007 / 80 € - 524 ffr. / 352 pages ISBN : 978-8874393794 Imprimer
Wants Peng est venu vivre à paris en 1965. Mais il est né dans la bourgeoisie chinoise de Chengdu, dans la Chine centrale, province du Setchouan en 1939. Les dix premières années de sa vie se passent dans la province des 4 fleuves, une enfance heureuse malgré linvasion japonaise depuis 1937 et la guerre. En 1945, cest la fin de la trêve entre la bourgeoisie nationaliste du Kouo-Min-Tang de Tchang Kaï Chek et le PC de Mao, et le début de la guerre civile. Sa famille, liée à lancien régime, se divise : lui et son père partent en 1949 à Taïwan. Séparé d'une partie de sa famille, il ne revient en Chine que récemment. De retour dun voyage attendu et craint à la fois, le peintre écrit des poèmes, qui ouvrent les séries dimages. Cette histoire familiale habite le peintre et son uvre, qui peut sembler assez morbide au premier abord, car le corps souffrant ou supplicié y est très présent.
uvre difficile à définir, comme lidentité du peintre. Très chinoise dans ses thèmes (la Chine de son enfance, celle des fumeries dopium, des seigneurs de la guerre, des photos de famille et des bourgeois occidentalisés et accompagnés de merveilleux teckels et pékinois), mais aussi dans certains de ses modes de représentation (les dessins au crayon, inspirés des paysages de montagne) et dans ses couleurs pour les tableaux. Mais loccident se montre dans lobsession du corps humain, certes traité parfois, mais le contraste nen est que plus saisissant, dans un mode traditionnel asiatique détourné : car cest le corps dans diverses postures qui surgit du blanc de lespace et non le Fujiyama ou quelque montagne sacrée ! Sur un mode hyper-réaliste parfois inspiré de la peinture américaine, Peng retrouve des tableaux admirés : un corps du christ de Mantegna, traité en cadavre bleu dhôpital par exemple. Dès sa formation à Taïwan, Peng a été impressionné par Michel Ange et son traitement des corps nus. Parfois ses femmes en chair à collier de perles et gorge opulente déployée font aussi penser à Rubens, ses généraux à du Otto Dix. Il y a aussi ces corps pris dans de lugubres machines à pointes et rouages, ces bébés vieillards. Et puis ce dessin dun tank, tout autre chose : mouvement, vitesse et menace. Un thème obsédant se dégage : la fragilité de lindividu, exposé par le corps et broyé par le destin. Obsédant mais pas exclusif : soudain poussent des fleurs de crayon, fragiles. Il y a de la beauté, des moments de grâce, la délicatesse de ce quon manque souvent de voir. Il y aussi lart, qui témoigne du monde et des hommes, compatit et salue, ou dénonce la vulgarité et la cruauté.
Le livre offre la meilleure rétrospective de luvre en létat actuel, car beaucoup duvres de jeunesse, vendues il y a des décennies, ont disparu : climat ? successions dispersées ? Il faut aussi dire qualors Peng ne signait pas. La chasse aux vestiges est ouverte. En attendant, ce musée imaginaire, qui vous donnera peut-être envie daller au 25 rue de Tournon (près du sénat et de linstitut Goethe à Paris) à la galerie de Pierre Brullé voir quelques pièces en chair et en toile. A moins que ce ne soit linverse, auquel cas vous trouverez des exemplaires du catalogue sur place. Les reproductions sont de grande qualité et accompagnées de textes de spécialistes et amies du peintre, qui suivent son uvre depuis longtemps. Parmi eux, Chang Ming, sa fille, enseignante à luniversité, dont on a déjà présenté ici deux ouvrages dhistoire de lart : pour prolonger notre rapide biographie de lartiste.
Nicolas Plagne ( Mis en ligne le 29/06/2007 ) Imprimer
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