|
Histoire & Sciences sociales -> Sociologie / Economie |
 | |
Réflexions sur la violence | | | Wolfgang Sofsky Traité de la violence Gallimard - TEL 2015 / 11 € - 72.05 ffr. / 22 pages ISBN : 978-2-07-014853-0 FORMAT : 12,5 cm × 19,0 cm
Bernard Lortholary (Traducteur) Imprimer
Wolfgang Sofsky (né en 1952) est un sociologue, un journaliste et un écrivain allemand qui s'intéresse aux questions de la guerre et du pouvoir. Ce traité de la violence peut paraître désespéré et pessimiste, mais il est salutaire. Il ne sagit pas pour Sofsky de céder au moralisme ambiant mais de faire un constat aussi lucide que juste. Le lecteur doit alors se poser la question des divers déguisements de la violence.
État, arme, passion, douleur, torture, exécution, combat, chasse, massacre, destruction des choses et des êtres, Wolfgang Sofsky traite des formes diverses de la violence. Et il pose une question : pourquoi la violence est-elle conjointe au développement de la civilisation sous de multiples formes ?
Wolfgang Sofsky ne procède pas à une analyse interne de sa contagion mais de lextérieur. Il décrit son impact opéré de diverses manières par létat ou lindividu. Loin dendiguer la violence, la civilisation la propage. Car cette violence nest pas animale selon lui ; elle est proprement humaine, démultipliée par la raison. L'homme de raison cherche à expliquer la violence, l'intention, le but qui anime le criminel (Gilles de Rais) mais il ny a aucune explication rationnelle à son déploiement sans fin.
Pour comprendre, il faut se déprendre dune illusion principale et accepter l'idée qu'il n'y a guère de progrès possible concernant la violence. C'est la culture humaine et non la nature qui a fait de l'homme un être capable de tout. En témoigne ce passage aussi terrible quéclairant : «Ce ne sont pas des forces pulsionnelles naturelles qui confèrent à la violence sa continuité culturelle, mais des potentialités spécifiquement humaines. Les mauvaises actions envers autrui prennent racine dans la capacité daction de lhomme. Linvention darmes et de cruautés nouvelles est due à son imagination illimitée. Cest parce que lhomme peut tout se représenter quil est capable de tout. Cest parce quil nest pas mené par ses instincts mais quil est un être spirituel, quil peut se comporter de façon pire que les bêtes. Cest parce quil est un être doté de culture, pouvant créer sa propre violence, quil est en mesure daccroître démesurément ses forces destructives. Cest parce quil nest pas déterminé de manière fixe quil est capable de tous les crimes» (p.209).
La civilisation évolue et la violence avec, sans atténuation donc puisque la première est le socle fondateur de la seconde. Un essai implacable et lucide.
Yannick Rolandeau ( Mis en ligne le 08/07/2015 ) Imprimer | | |
|
|
|
|