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Films  ->  Fantastique / Science-Fiction  
Stalker
avec Andrei Tarkovski, Alexandre Kaïdanovski, Anatoli Solonitsyne, Nikolaï Grinko, Alissa Freindlich
MK2 2005 /  27.50  € - 180.13 ffr.
Durée film 155 mn.
Classification : Tous publics

Sortie cinéma : URSS, 1979
Titre original : Stalker

Version : 2 DVD 9 – Toutes Zones – PAL
Format vidéo : 4/3
Format image : 1.33 (couleurs)
Format audio : Version originale russe 5.1, version originale russe mono
Sous-titres : Français, russe, anglais, espagnol, italien, hollandais, japonais, suédois, allemand, portugais, hébreu, arabe, chinois (Taiwan)

Compléments DVD 1 :
Galerie de photos
Biographie du réalisateur
Extrait du travail de diplôme d’Andreï Tarkovski, Le rouleau compresseur et le violon (5 min.)
La maison de Tarkovski (6 min.)


Compléments DVD 2 :
Interview de A. Kniajinski, directeur de la photographie (6 min.)
Interview de R. Safioulline, décorateur (15 min.)
Interview de E. Artémiev, compositeur (21 min.)
Filmographies et bande annonce cachée

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« Nous sommes les témoins du dépérissement du spirituel, alors que le matériel a depuis longtemps formé son propre système organique, qui est même devenu le fondement de notre vie sclérosée et menacée de paralysie. Tout le monde voit bien que le progrès matériel n’apporte pas aux hommes le bonheur. Mais néanmoins, tels des fanatiques, nous continuons à en multiplier les performances. Ce faisant, nous en sommes arrivés à la situation évoquée dans Stalker : le présent se confond avec le futur, en ce sens que le présent renferme tous les prémisses de l’inévitable catastrophe que nous réserve le proche avenir, ce dont nous avons pleinement conscience, tout en étant incapables de l’éviter. » (Andreï Tarkovski, extrait du Temps scellé, Editions de l’Etoile / Cahiers du cinéma, 1989).

Lorsqu’il évoquait le dénuement spirituel de notre monde moderne, le cinéaste russe n’y allait jamais de main morte. Stalker, son cinquième film et le dernier tourné dans son pays, exprime ce constat tout aussi sévèrement. Le Stalker est un guide clandestin, qui conduit ses clients au cœur d’une Zone interdite, jusqu’à une chambre où leurs vœux les plus chers seront exaucés. Cette fois, il emmène l’Ecrivain et le Professeur, qui cherchent l’inspiration et le génie. Franchissant les barrages, les trois hommes arrivent dans un monde étrange, où les lois naturelles ne s’appliquent plus. Arriver au bout du chemin ne sera pas simple.

« Quel est donc le thème central de Stalker ? D’une manière générale, c’est celui de la dignité de l’homme et de l’homme qui souffre de son manque de dignité », écrivait Tarkovski. L’Ecrivain et le Professeur sont des êtres malheureux recherchant l’espoir, mais incapables de prendre réellement de la hauteur. Au lieu de ça, ils se disputent sur leurs mérites respectifs et essayent d’être les plus malins. Ils ne comprennent pas que la Zone, dont les pièges restent invisibles et où il ne faut jamais aller en ligne droite ni rebrousser chemin, est surtout un espace spirituel ; on doit y raisonner, non pas selon les principes de la géométrie euclidienne, mais selon sa foi. La dimension profondément religieuse du film apparaît clairement lors d’un songe – ou une vision – du Stalker, où l’on entend un passage de l’Apocalypse. Réveillé, le Stalker cite à son tour la Bible, établissant un parallèle entre les deux hommes et d’autres qui, à l’époque, n’ont pas reconnu le Christ. Il se définit ainsi comme un guide spirituel dans un monde qui a perdu la foi. Un univers triste et délabré, filmé en noir et blanc et sépia, où le Stalker se sent partout comme en prison. Ce n’est que lorsque les trois hommes arrivent enfin dans la Zone, après une scène hypnotique aux sonorités étranges illustrant la transition d’un niveau de réalité à un autre, que les couleurs apparaissent.

A la fois spirituel, fantastique et poétique, Stalker n’a rien d’habituel, et son appréciation demande au spectateur une certaine foi, pas forcément religieuse : il s’agit vraiment de croire en la réalité des pouvoirs de la Zone, en dépit de leur manque d’évidence. Fidèle à ses principes, Tarkovski refuse en effet toute démonstration spectaculaire et ne révèle l’étrangeté de ce lieu que par des indices plus subtils : d’étonnants changements dans le paysage, une « voix » d’avertissement peut-être imaginaire, des tanks et des véhicules à l’abandon, une perte de repères spatiaux entre les plans… Certaines sonorités (eau stagnante ou en cascade, grincements, bruissements de feuilles, mélodie lancinante…) accentuent l’impression d’incertitude et d’instabilité de cette longue progression. Car le réalisateur joue comme jamais sur la durée : si le rythme accélère parfois durant la première demi-heure, notamment lors du franchissement des barrages, il ne cesse ensuite de ralentir, contrairement aux normes habituelles. La Zone demande une grande patience… mais un spectateur gardant la foi sera récompensé au final par une élévation spirituelle indéniable !

Pour rester quelques minutes de plus dans l’ambiance de Stalker, le complément La maison de Tarkovski vaut le détour. Des extraits du film sont associés à des vues de la maison d’enfance du réalisateur, à présent complètement en ruines. Un parallèle surprenant, qui donne l’impression qu’un morceau de la Zone a été préservé en plein milieu urbain… Parmi les trois interviews regroupées sur le deuxième DVD, la plus forte est celle du décorateur R. Safioulline. Il y raconte l’incroyable aventure du tournage, un véritable calvaire pour Tarkovski. En effet, la pellicule utilisée au départ n’ayant pu être correctement développée à Moscou, une année de travail s’en est trouvée ruinée. Un choc terrible pour le réalisateur (qui en a fait un infarctus en avril 1978), obligé de refaire entièrement son film ! Peut-être même s’agissait-il d’un coup monté ? « Je vous assure, dit Safioulline, je les hais, les types qui lui ont fait ce sale coup, qui l’ont mis dans une situation impossible ! Il s’agissait d’accomplir un miracle pour terminer Stalker. » Un véritable acte de foi, en somme, d’autant plus que Tarkovski devait se débrouiller avec la moitié du budget initial ! La seule solution restait alors de faire du troc pour récupérer du matériel, de se débrouiller avec un minimum d’accessoires, mais toujours sans aucun compromis artistique. Un document vraiment émouvant, qui rend un bel hommage à un cinéaste intransigeant et à part.


Ludovic Ligot
( Mis en ligne le 06/06/2005 )
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