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Poches -> Littérature |
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Les souvenirs n’en font qu’à leur tête… | | | Jean-Baptiste Harang Nos coeurs vaillants Le Livre de Poche 2012 / 5,60 € - 36.68 ffr. / 152 pages ISBN : 978-2-253-16202-5 FORMAT : 11,1 cm × 18,0 cm
Première publication en août 2010 (Grasset) Imprimer
Que lon ne se méprenne pas : ce roman de Jean-Baptiste Harang nest pas un livre de souvenirs ; ou plutôt si, mais il est bien autre chose quune simple évocation des temps anciens où il faisait si bon vivre.
Tout commence par une lettre qui na danonyme que labsence de signature : à sa lecture, le narrateur aura beau jeu den retrouver lauteur, un ami denfance, qui se dit froissé de navoir pas été cité dans les précédents livres de lécrivain, comme si lamitié qui existait entre eux nétait rien comparée à celles qui existaient avec dautres. Cette lettre va replonger le narrateur dans un monde disparu, celui de son enfance et du mouvement catholique des «curs vaillants» dont il faisait partie ; ce mouvement, les amitiés et amours de jeunesse qui sy nouent, les apprentissages de la vie, la relation tout en ambigüité avec «labbé T.» qui soccupait du groupe, tout cela va façonner la vie du narrateur qui prend conscience, en les évoquant, de limportance quont eue pour lui tous ces moments convoqués par le souvenir.
Les personnages sont caressés de la plume, croqués comme une esquisse au fusain qui ne ferait ressortir que quelques traits caractéristiques du modèle. «Monsieur Pétiard était petit, vague Francis Blanche aux lunettes épaisses, ses bretelles lui remontaient le pantalon jusquaux aisselles, à table il enfonçait sa serviette dans son col de chemise, avec le naturel de celui qui a lhabitude de dîner seul». Au cours du récit, quelques rencontres fugitives qui ne seront quévoquées, jamais revues par la suite, comme des nuages éphémères passant dans lazur ; la plus importante dentre elles, une mystérieuse Agathe, ponctue quelques chapitres de phrases définitivement courtes («Mais Agathe nest pas de ce livre
»).
Et puis, rythmant cette jeunesse, ces six semaines annuelles dans le Jura. Dabord colon puis directeur pédagogique de ce centre de vacances, le narrateur y vit tout ce que peuvent vivre des adolescents, puis jeunes adultes des années 50-60, dans des conditions matérielles précaires, mais quelle importance quand on vit réellement de tout son cur et de tout son corps ? «La colonie est un ensemble de trois corps de ferme, dans une vallée du Jura
Jy fis de longs et nombreux séjours, de lâge de six ans jusquà vingt-deux, et my rendis quelques fois depuis, poussé par cette nostalgie qui confie les clefs au rêve,
Je pourrais décrire les lieux mètre carré par mètre carré, les coins arrondis par la patine du temps et des ombres, bien embarrassé de choisir par quel bout commencer
».
Un livre qui na rien de nostalgique, sans «cétait mieux avant», et dont la légèreté du style nempêche nullement une réelle profondeur des évocations. «Guy Debord a bien raison, la jeunesse est un état passager. La vie aussi, à peine plus long, mais à force de trop lorgner sur le premier, on risque de laisser filer lautre comme si de rien nétait».
Jean-Baptiste Harang est un écrivain et journaliste français né en 1949 ; il a également été journaliste et critique littéraire à Libération et au Magazine littéraire. Nos curs vaillants, a obtenu le Prix du jury Jean Giono 2010.
Michel Pierre ( Mis en ligne le 07/01/2013 ) Imprimer
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