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La Satiété du spectacle
avec Jean-Luc Godard, Marina Vlady, Annie Duperey, Roger Montsoret
Arte Vidéo 2004 /  24.99  € - 163.68 ffr.
Durée film 85 mn.
Classification : Tous publics

Sortie Cinéma : 1966, France

Version : DVD 9/Zone 2
Format vidéo : 4/3
Format image : 2 : 35 (couleurs)
Format audio : Français (mono)


Bonus :
Livret de 44 pages
Débat télévisé entre Jean-Luc Godard et Jean Saint-Geours sur la prostitution
Discussion entre Freddy Buache et Païni, Le Fantôme du réel
Un extrait de l’émission « Dim dam dom » (1967), avec des interviews de Jean-Luc Godard et de Marina Vlady sur le plateau du film
Bande-annonce originale

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Deux ou trois choses que je sais d’elle, qui reçu le Prix Femina, livre le portrait d’une femme devenue indifférente à tout, ballottée dans un no man’s land suburbain, entre la violence des rapports humains, et la morosité routinière de sa vie d’épouse et de mère. Le film ne se centre pas uniquement autour de Juliette (Marina Vlady), qui traîne sa solitude résultant d’une impossibilité de communiquer et d’aimer. Jean-Luc Godard souhaite, comme il le précise dans la bande-annonce, étendre son propos à la cruauté du néo-capitalisme, la prostitution, la région parisienne, la guerre du Vietnam, la call-girl moderne, la mort de la beauté humaine, la circulation des idées et la gestapo des structures. Les premières images renseignent, également, sur le projet de l’œuvre. Une histoire non linéaire permettant à des acteurs d’énoncer des citations de vérités, reprenant ainsi la définition bretchtienne du théâtre.

Le film est émaillé de témoignages de femmes, qui décrivent la vacuité de leurs existences, tandis que la voix off chuchotée de Godard contrebalance le chaos ambiant, et le bruit assourdissant des travaux. Dans ses commentaires, le cinéaste scrute la vie de la cité, et de ses habitants, comme le ferait un ethnologue structuraliste, en considérant l’ensemble du système. Jean-Luc Godard ne prétend pas analyser les dérives de la société, tel que le ferait un sociologue, mais propose des pistes subjectives afin de comprendre et d’anticiper, de façon visionnaire, les problèmes générés par les banlieues et la société de consommation. Il pointe déjà en 1966, la déshumanisation de ces grands ensembles, où se retrouvent parqués les plus défavorisés, allant ainsi à l’encontre de l’utopisme architectural, prévalant à l’époque, encouragé par le gouvernement Gaulliste.

Le choix du format en Cinémascope, pour réaliser des panoramiques sur la ville nouvelle, accentue la verticalité et l’horizontalité des barres d’immeubles qui bouchent toute perspective en fermant l’espace. Dans cet univers, les seules promesses d’évasion, résidant dans des logos et des publicités pour des compagnies aériennes, restent payantes. Même la vue du ciel est parcellaire, puisqu’on l’entraperçoit entre les HLM, les grues de chantier, les enseignes de magasins, dont l’un se nomme « AZUR ». Cette inscription, malicieusement cadrée, signifie que les choses ne sont plus vues, mais simplement nommées. Le langage ne sert plus la communication mais à vendre et à se vendre, tandis que les messages publicitaires assènent que le bonheur passe avant tout par la consommation.

Jean-Luc Godard considère : « la restructuration de la région parisienne comme un grand bordel », tel qu’il le précise dans le débat de l’émission télévisée « Zoom » (1966), qui figure dans le bonus. Tout en citant de nombreux passages du livre de Raymond Aron, Dix-huit leçons sur la société industrielle, le cinéaste part d’une enquête de Catherine Vimenet, publiée dans Le Nouvel Observateur, arguant que pour vivre dans la société actuelle, on est contraint de se prostituer à des degrés divers. A travers le personnage de Juliette, qui s’adonne occasionnellement à la prostitution pour arrondir ses fins de mois, il développe ainsi une vision marxiste dans le prolongement de Masculin Féminin, tourné la même année. Ce collage de sons et d’images, à l’instar de la très belle affiche du film inspiré du courant plasticien des Affichistes, est un document incomparable sur la perte des valeurs, du langage et de la pensée. Un monde où tout se vend et s’achète et où les êtres humains, transformés en marchandise, vivent dans l’aliénation de la civilisation des loisirs que Godard regarde se mettre en place.

Les suppléments comportent, entre autres, une discussion entre Freddy Buache et Dominique Païni sur le film, des interviews de Jean-Godard et de Marina Vlady sur le tournage, et la bande-annonce originale muette qui donne la primauté à l’image et au texte.


Corinne Garnier
( Mis en ligne le 13/12/2004 )
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