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La Passion selon Nana
avec Jean-Luc Godard, Anna Karina, Saddy Rebbot, André S. Labarthe, Jean Ferrat
Opening 2004 /  24.99  € - 163.68 ffr.
Durée film 80 mn.
Classification : Tous publics

Sortie Cinéma : 1962, France
Sortie DVD : novembre 2004

Version : DVD 9/Zone 2
Format vidéo : 4/3
Format image : 1.33
Format audio : Français mono


DVD 1
Le film

DVD 2
Présentation de 3 courts métrages de Jean-Luc Godard par Noël Simsolo
Tous les garçons s’appellent Patrick (1957)
Histoire d’eau (1958)
Charlotte et son Jules (1959)
Vivre sa vie, interview de Jean Narboni par Noël Simsolo
L’enjeu des paradoxes, interview de Mathieu Amalric par Noël Simsolo

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Après avoir tourné ensemble Le Petit soldat (1960) et Une Femme est une femme (1961), Jean-Luc Godard offre à Anna Karina le plus beau rôle de sa carrière en lui confiant l’interprétation du personnage principal de Vivre sa vie. Vendeuse chez un disquaire, Nana, prénom donné en référence au roman éponyme d’Emile Zola, refuse de retourner vivre auprès de Paul, malgré ses difficultés financières. Elle rêve de faire du théâtre, ou du cinéma, et accepte de payer chèrement ses velléités d’émancipation en tombant sous la coupe d’un proxénète (Saddy Rebot). Elle s’adonne alors à la prostitution avec détachement et indifférence, préfigurant ainsi le personnage de Marina Vlady dans Deux ou trois choses que je sais d’elle (réalisé par Godard quatre ans plus tard), jusqu'à ce qu’elle tombe amoureuse d’un jeune homme blond (Peter Kassovitz) qui lui redonne goût à la vie, et la volonté d’en changer.

Anna Karina, présente sur quasiment chacun des plans, est enveloppée par la caméra caressante d’un cinéaste amoureux. Dans cette véritable ode à son épouse, servie par la musique envoûtante de Michel Legrand, Godard dresse le portrait d’une femme naïve, prête à tout pour conserver sa liberté dans son désir de vivre sa vie. La fusion est parfaite entre l’actrice et le cinéaste. La caméra la suit pas à pas, ne dévoilant ses sentiments que par l’observation de ses gestes les plus simples, mais Nana, sans cesse en mouvement, reste insaisissable. Elle garde son âme tout en donnant son corps, comme le préconise la phrase de Montaigne en exergue au début du film : « Il faut se prêter aux autres et se donner à soi-même. »

Cependant, Godard refuse tout naturalisme et marque toujours une distance avec l’objet observé en « picturalisant » notamment les corps. Ceux des prostituées, dans la scène de l’hôtel, où les tableaux vivants de leurs nudités hiératiques évoquent des peintures d’Ingres. Le cinéaste morcelle également les parties du corps de Nana, tel un peintre lors d’études réalisées en préparation d’une œuvre, par longs plans fixes sur sa nuque, ses mains, et son visage de face ou de profil. Ces gros plans, qui font explicitement référence à la nouvelle du Portrait ovale d’Allan Poe, sont réalisés pour révéler l’âme qui se cache derrière un visage, et rappelle les paroles du personnage joué par Belmondo dans le court métrage Charlotte et son Jules : « Quand on regarde le visage d’une femme, on voit son âme. » La séquence dans le cinéma, qui projette La Passion de Jeanne d’Arc de Dreyer, est l’unique scène où elle paraît exprimer son désarroi. Le cinéaste juxtapose par un champ-contrechamp les visages en gros plan larmoyants de l’héroïne et celui de Falconetti, qui refuse de se parjurer et accepte le martyre. Mais Nana pleure-t-elle par désespoir ou par empathie avec le personnage à l’écran ? Les femmes restent pour Godard une énigme, un mystère dont il essaie de percer la complexité à travers toute sa filmographie.

Vivre sa vie, Prix spécial du jury et de la Critique au Festival de Venise en 1962, est sans conteste un des plus beaux films de Godard bien qu’il soit, malheureusement, celui qui reste le plus méconnu de sa période Nouvelle Vague. Des questions existentielles, en vogue à cette époque, sont abordées notamment lors de la rencontre fortuite dans un bar entre l’héroïne et le philosophe du langage, Brice Parrain. Ce simple accostage professionnel tourne à une discussion sur les difficultés de communiquer, de vivre en pensant, et la nécessité de passer par l’erreur pour accéder à la vérité. Cette collusion est habituelle dans l’œuvre du cinéaste qui oscille entre la fiction, par l’affirmation de la théâtralité, et le documentaire (de l’errance de la péripatéticienne qui arpente les rues du Paris des années soixante à la description technique de la prostitution en voix off décrivant les détails les plus triviaux). Le sujet récurrent de la prostitution, également présent dans deux courts métrages datant eux aussi des années soixante, Une jeune coquette (1955) et Anticipation (1966), apparaît comme le paradigme de l’oppression qu’exerce la société et de la solitude.

Les suppléments, très complets, proposent une interview de Jean Narboni autour de Vivre sa vie, ainsi que celle de l’acteur et réalisateur, Mathieu Amalric, qui commente trois courts métrages de Godard (contenus également dans les bonus du DVD). Tous les garçons s’appellent Patrick, sur un scénario de Rohmer, et Histoire d’eau (1958), co-réalisé avec Truffaut, sont des marivaudages. Le premier suit un garçon inconstant, joué par Jean-Claude Brialy, qui drague deux filles au cours de la même journée, tandis que le second consiste en une brillante digression autour d’un couple qui cherche à rejoindre la capitale malgré les inondations. Dans Charlotte et son Jules (1959), un monologue déclamé par un garçon à la fille qui vient de le quitter, Godard prête sa voix à Belmondo, qui était absent le jour de la postsynchronisation. Ces petits films réalisés au tout début de sa carrière, à la fin des années cinquante, ont pour sujet la jeunesse de cette époque, et derrière une certaine légèreté pointe déjà une amertume certaine.


Corinne Garnier
( Mis en ligne le 17/01/2005 )
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