Napoléon Bonaparte Correspondance générale - Tome 11 - Bruits de bottes - avril 1811-décembre 1811 Fondation Napoléon Fayard 2015 / 54.90 € - 359.6 ffr. / 1584 pages ISBN : 978-2-213-69393-4 FORMAT : 15,6 cm × 24,3 cm
L'auteur du compte rendu : Archiviste-paléographe, docteur habilité de l'université de Paris I, Thierry Sarmant est conservateur en chef au Service historique de la Défense. Spécialiste de l'histoire de l'Etat, il a publié en dernier lieu une biographie de Louis XIV, Louis XIV homme et roi (Tallandier, 2012) et 1715 : la France et le monde (Perrin, 2014). Imprimer
Ce onzième volume de la Correspondance générale de Napoléon, dirigé par Thierry Lentz avec lassistance de François Houdecek et dIrène Delage, doit être lantépénultième de la série. Le volume qui le suit logiquement, celui comportant les lettres de 1812, est paru en 2012 pour épouser le rythme des commémorations de la campagne de Russie. Restent à paraître le tome consacré au premier semestre de 1813 et celui qui traitera de la période 1813-1821 et posera la dernière pierre de la plus ambitieuse entreprise dérudition historique du dernier demi-siècle.
Lannée 1811 correspond à lextension maximale de lEmpire napoléonien. La «vieille France» nest plus que le centre dun monstre géopolitique néo-carolingien, une pieuvre territoriale qui étend ses tentacules vers lItalie centrale, lIllyrie, la Hollande et lAllemagne du Nord. Lannexion de la Catalogne, en janvier 1812, sera lultime accroissement de la Grande Nation. 1811 marque aussi, avec la naissance du roi de Rome, linstallation de la monarchie impériale dans le vieux moule dynastique.
À ces flatteuses apparences, les observateurs avertis opposent les signes avant-coureurs de la crise à venir : la Grande-Bretagne demeure invaincue, la guerre persiste en Espagne, lAllemagne est incertaine, la Russie prépare sa revanche. Napoléon sent venir la confrontation décisive avec lours russe et sa correspondance conservée pour lannée 1811 est consacrée presque exclusivement au renforcement et à la mise en ordre de ses armées. À Paris, ses principaux correspondants sont Clarke, le ministre de la Guerre, Lacuée, le ministre de lAdministration de la guerre, et Decrès, le ministre de la Marine. Savary, ministre de la Police, et Maret, promu en avril ministre des Relations extérieures, sont le plus souvent mis en action pour des questions relatives au renseignement, à la propagande ou au blocus continental. Les interlocuteurs de lEmpereur hors de la capitale son le prince Eugène, vice-roi dItalie, les maréchaux Berthier, major général de larmée dEspagne, Davout, commandant en chef du corps dobservation de lElbe, et Marmont, commandant de larmée de Portugal.
Mais dignitaires civils et militaires demeurent de purs exécutants. Napoléon est à la fois, et jusquà la caricature, général en chef, ministre de la Guerre et surintendant des armées. Omniscient et omni-compétent, lEmpereur trace dune main aussi souveraine le dessin dun fortin de bord de mer que le plan dorganisation dun corps darmée. Toute son attention est concentrée vers la préparation de la guerre à venir.
On est frappé, par contraste, de la nullité de lactivité proprement diplomatique. Le Napoléon de 1811, qui «se promène dans sa gloire», ne connaît plus que la politique de force. Encore un an, et il en subira le contrecoup.
Thierry Sarmant ( Mis en ligne le 04/03/2016 ) Imprimer |